Entre les deux, il y avait “de nombreux corps flottant dans la mer, mais surtout des dizaines de personnes qui, secourues par l’embarcation libyenne, se sont jetées à l’eau pour tenter de rejoindre les bateaux qui leur auraient ouvert les portes de l’Europe”, écrit le journal italien. Car repartir en Libye, c’est connaître “à nouveau la prison, à nouveau la torture, les violences, et une nouvelle rançon à payer pour retenter la traversée”.

La Repubblica décrit :

Plusieurs minutes tragiques de chaos, qui se sont achevées avec la fuite en avant de la vedette libyenne, laquelle, après avoir tenté de retenir les migrants à bord avec violence et menaces, a rallumé le moteur et filé à toute allure vers Tripoli. À son bord, 42 survivants qui, hurlant, tendaient désespérément les bras vers leurs femmes, enfants, frères et sœurs dont ils venaient probablement d’être séparés pour toujours.”

Un hélicoptère de la marine italienne est intervenu et a crié aux Libyens : “Des personnes sont en train de sauter à l’eau, couper les moteurs et collaborez avec Sea Watch. S’il vous plaît, collaborez avec Sea Watch.” En vain. D’après La Repubblica, au moins 50 personnes ont disparu. Le parquet de Ragusa a ouvert une enquête pour tenter d’établir les responsabilités, indique encore le quotidien de centre gauche. “Dans les prochains jours, les magistrats recueilleront les témoignages des 59 survivants arrivés à Pozzallo sur le bateau de Sea Watch, qui emmenait aussi le corps d’un enfant de deux ans, mort noyé sous les yeux de sa mère, et ceux de 4 autres victimes”.

L’Europe confie le sort des migrants à la roulette russe

À l’initiative du gouvernement italien, l’Union européenne a scellé début 2017 un accord avec l’un des pouvoirs en présence en Libye, pour qu’il empêche les départs de migrants. En échange de fonds, de formations et d’équipement, les garde-côtes du président Faiez Serraj interceptent les embarcations dans les eaux libyennes et reconduisent les migrants dans des centres de rétention. Presse et organisations humanitaires ont documenté les abus dont ils sont victimes sur ce territoire en proie au chaos.

Pour la première fois depuis l’entrée en vigueur des accords entre l’Italie et le gouvernement de Faiez Serraj, conclut La Repubblica, ce sauvetage dramatique ouvre les yeux à l’Europe sur le sort des milliers de personnes qui tentent la traversée de la Méditerranée, sort qu’elle a confié à la roulette russe.”