Les garde-côtes tunisiens ont retrouvé, mercredi, 13 corps de migrants originaires d’Afrique subsaharienne au large des villes de Chebba et Salakta, au centre-est de la Tunisie. Une enquête judiciaire a été ouverte pour déterminer les circonstances de leur noyade.
Treize cadavres ont été retrouvés par une unité de garde-côtes en Méditerranée, au large des villes de Chebba et Salakta, dans le centre-est de la Tunisie, a indiqué mercredi 25 septembre Farid Ben Jha, porte-parole du parquet de Mahdia et Monastir.
Ces corps sont tous ceux d’hommes originaires d’Afrique subsaharienne, a-t-il ajouté.
Une enquête judiciaire a été ouverte pour déterminer les circonstances de leur noyade, a précisé le porte-parole, sans autre précision.
Il n’est pas rare de retrouver des dépouilles de migrants au large de la Tunisie, pays de transit pour les exilés africains désireux de rejoindre l’Europe. Le 12 septembre, six cadavres avaient déjà été découverts en mer près de Monastir. Parmi eux, cinq femmes subsahariennes et un enfant âgé d’à peine deux ans.
D’autres corps ne sont en revanche jamais retrouvés. Des « naufrages invisibles » peuvent se produire dans l’immensité de la Méditerranée, sans laisser de traces.
Plus de 1 300 morts au large de la Tunisie
La Tunisie est, avec la Libye, l’un des principaux points de départ en Afrique du Nord pour les migrants — surtout originaires d’Afrique subsaharienne mais aussi un grand nombre de Tunisiens — qui risquent la périlleuse traversée de la Méditerranée dans l’espoir de rejoindre l’Europe.
Chaque année, des dizaines de milliers de migrants, en majeure partie des Subsahariens fuyant la pauvreté et des conflits notamment au Soudan ou au Mali, tentent d’atteindre les côtes italiennes. L’île italienne de Lampedusa ne se trouve qu’à une centaine de kilomètres des côtes tunisiennes.
Mais cette traversée est particulièrement dangereuse. Plus de 1 300 migrants sont morts ou ont été portés disparus l’année dernière dans des naufrages près des côtes tunisiennes, selon l’ONG Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux.
Sur la dernière décennie, un total de 30 309 migrants ont péri en Méditerranée, dont 3 155 en 2023, l’une des années les plus meurtrières, et 1 405 depuis le début de l’année 2024, selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Plus de 61 000 migrants « empêchés » de rejoindre l’Italie
Pour tenter d’enrayer les départs depuis les rives italiennes, les Tunisiens se sont dotés en juin d’un MRCC (Maritime Rescue Coordination Centre), sorte de tour de contrôle maritime en charge d’une SAR zone (zone de recherche et de sauvetage) dans la Méditerranée.
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Jusqu’à présent, la Tunisie ne disposait pas de sa propre zone de recherche et de sauvetage en mer. Lorsque des canots d’exilés quittaient les côtes de Sfax et s’éloignaient des eaux territoriales de la Tunisie, ils se retrouvaient dans des eaux internationales sous responsabilité libyenne ou maltaise le plus souvent. En élargissant leur champ d’intervention en mer, les autorités tunisiennes peuvent désormais légalement intercepter les canots de migrants dans les eaux internationales et les ramener en Tunisie.
Depuis le début de l’année, les forces tunisiennes ont « empêché le départ de plus de 61 000 migrants qui voulaient rejoindre les côtes européennes », a affirmé mercredi sur le réseau social X le ministère italien de l’Intérieur. « Un chiffre qui témoigne de l’engagement constant des pays d’origine et de transit des migrants dans la lutte contre l’immigration irrégulière ».
Les ONG en revanche s’inquiètent de ces interceptions. « Nous ne considérons pas la Tunisie comme un lieu sûr pour les personnes qui y fuient », expliquait en juin Médecins sans frontières (MSF) à InfoMigrants. « Les survivants [secourus en mer par le navire humanitaire Geo Barents] ont souligné leur inquiétude quant à leur sécurité s’ils étaient ramenés en Tunisie. Le type de blessures constatées par notre équipe médicale [à bord] nous ont donné un aperçu de la souffrance et de la violence vécues par les populations originaires des pays africains en Tunisie. »
De plus, les exilés accusent souvent les forces tunisiennes de manœuvrer dangereusement près des embarcations, provoquant des naufrages. Ils sont aussi accusés de voler les moteurs des canots de migrants qui tentent de rejoindre l’Europe, les laissant dériver des heures en pleine mer.
Sources: infomigrants.net