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L’Allemagne veut accélérer les expulsions vers la Grèce, qui s’y s’oppose catégoriquement

Berlin souhaite accélérer les expulsions vers Athènes de milliers de demandeurs d’asile, passés par la Grèce et actuellement en Allemagne. Mais le gouvernement hellénique s’y oppose catégoriquement. En vertu du règlement Dublin, les demandeurs d’asile ne peuvent pas « déplacer » leur dossier dans l’Union européenne, ils sont attachés au premier pays d’entrée du Vieux continent.

Si le chancelier allemand Friedrich Merz a vanté les résultats économiques de la Grèce lors de la visite du Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis en Allemagne en mai dernier, la rencontre entre les deux hommes a aussi rappelé les tensions persistantes entre Berlin et Athènes sur la question migratoire. En théorie, les deux gouvernements conservateurs partagent la même détermination à mettre fin à l’immigration irrégulière en Europe.

Tous deux ont nommé des défenseurs d’une ligne dure aux postes en charge de la migration. En Allemagne, le conservateur Alexander Dobrindt défend la fermeture des frontières allemandes et les refoulements de demandeurs d’asile. En Grèce, c’est Makis Voridis, un homme politique d’extrême droite, qui est à la tête du ministère de la Migration et de l’Asile.

La Grèce, destination de transit

Sur le terrain, cependant, les deux pays ont des intérêts très différents. La Grèce se trouve à la frontière extérieure de l’Union européenne (UE). C’est une porte d’entrée de l’UE pour les migrants qui rêvent d’une vie meilleure dans les pays du nord et de l’ouest de l’Europe. Ainsi, de nombreux demandeurs d’asile déjà enregistrés ou reconnus réfugiés statutaires en Grèce poursuivent ensuite leur voyage vers l’Allemagne, la France ou les pays scandinaves.

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Selon l’association allemande de défense des droits Pro Asyl, environ 25 000 personnes auparavant reconnues comme réfugiées en Grèce ont demandé l’asile en Allemagne pour la seule année 2024.

Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis (à gauche) et le chancelier allemand Friedrich Merz. Crédit : Reuters
Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis (à gauche) et le chancelier allemand Friedrich Merz. Crédit : Reuters

Mais en vertu du règlement Dublin, les demandeurs d’asile doivent être pris en charge dans le premier pays d’arrivée dans l’Union. C’est pourquoi l’Allemagne tente d’accélérer les expulsions de ces personnes vers la Grèce, même si Athènes s’y oppose fermement.

Il existe désormais une base juridique pour « aider » le gouvernement allemand puisque la cour administrative fédérale de Leipzig, la plus haute juridiction allemande, a statué, en avril, sur ces expulsions. Sa conclusion : ces renvois sont possible puisque les migrants concernés ne font pas face à des difficultés extrêmes en Grèce. Le président du tribunal, Robert Keller, a déclaré que le critère d’évaluation a été de savoir si les migrants avaient accès à « du pain, un lit et du savon ».

Des milliers de personnes concernées

Depuis cette décision, l’Allemagne pourrait, en théorie, renvoyer plusieurs milliers de demandeurs d’asile en Grèce, en particulier des jeunes hommes en bonne santé et voyageant seuls. Mais Athènes fulmine. « Quels retours ? Cela remet en cause le principe de répartition équitable dans le cadre de la solidarité européenne », a déclaré le 25 avril le ministre grec des Migrations lors d’une interview à la chaîne d’information Skai. « Tant qu’il n’y aura pas de répartition équitable des charges au sein de l’Union européenne, la Grèce n’acceptera aucun retour », a-t-il martelé.

En 2025, du 1er janvier au 16 mai, Athènes a enregistré 114 retours, dont 48 en provenance d’Allemagne.

Selon le ministère grec des Migrations, 56 066 migrants sans papiers ont été enregistrés en 2024, soit quelque 155 par jour. Au cours de la même année, 219 personnes sont revenues d’Allemagne en Grèce.

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Seuls 473 réfugiés statutaires en Grèce ont regagné le sol hellénique l’année dernière en provenance de l’ensemble des pays de l’UE, y compris l’Allemagne.

Baisse de 30 % des arrivées

Les arrivées en Grèce ont connu une accalmie depuis le début de l’année. De janvier à avril, 8 295 personnes sont arrivées en Grèce, soit une baisse de 30 % par rapport à la même période l’année dernière. « Grâce à une protection efficace des frontières et à une meilleure coopération avec la Turquie, les flux d’immigration ont diminué d’environ 30 % au cours des quatre premiers mois, bien que l’afflux en provenance de Libye ait augmenté de 174 % », a déclaré le ministre Makis Voridis.

Le ministre grec de la Migration, Makis Voridis, s’oppose au rapatriement de demandeurs d’asile. Cédit : Picture alliance
Le ministre grec de la Migration, Makis Voridis, s’oppose au rapatriement de demandeurs d’asile. Cédit : Picture alliance

Auparavant, la route migratoire méditerranéenne partait effectivement de l’ouest de la Libye pour rejoindre l’île italienne de Lampedusa. Désormais, une nouvelle route s’est ouverte, elle relie Tobrouk, dans l’est de la Libye, à l’île grecque de Crète.

Or, l’est de la Libye n’est pas contrôlé par le gouvernement de Tripoli reconnu par l’ONU. Cette partie du pays est aux mains du maréchal Khalifa Haftar et de nombreuses milices. Makis Voridis a certes annoncé son intention de se rendre prochainement dans le pays, mais il n’a actuellement aucun interlocuteur, ni le budget nécessaire pour convaincre toutes les milices du pays de fermer la route entre Tobrouk et la Crète.

Les Grecs espèrent néanmoins passer un accord avec la Libye, similaire à celui que l’Italie a signé avec le gouvernement de Tripoli en 2017. En vertu de cet accord, les gardes-côtes libyens sont chargés de stopper les embarcations de migrants en Méditerranée, en échange d’une aide financière italienne. Ces interceptions ont été maintes fois dénoncées par les ONG, rapportant des faits de violences sur les exilés, et des intimidations envers les humanitaires opérant des sauvetages en mer.

Sources: infomigrants

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