Le ministère grec des Migrations a annoncé mercredi que seules 18 des 40 ONG actuellement actives auprès des migrants dans les camps du pays allaient pouvoir poursuivre leur action en vertu d’une récente loi visant à « réguler » ce secteur qu’il juge « opaque ».
C’est un vaste coup de balai qui passe mal auprès des militants pour la cause des exilés en Grèce : Notis Mitarachi, le ministre grec des Migrations et de l’Asile a annoncé mercredi 17 juin que le nombre d’ONG présentes auprès des migrants dans les camps du pays passait de 40 à seulement 18. Le ministre s’appuie sur une nouvelle loi dont l’objectif est de « réguler » et « éclaircir » un secteur jugé « opaque ».
Et pour cause, lors de la crise migratoire de 2015, de très nombreuses associations se sont implantées en Grèce, devenue l’une des portes principales de l’Europe pour des centaines de milliers de candidats à l’exil. Ces derniers temps, un certain nombre de ces ONG avaient quitté le terrain sans en informer le gouvernement qui a donc décidé de créer un registre clair, répertoriant les acteurs du milieu associatif.
Dans cette optique, les ONG avaient jusqu’à mercredi pour s’enregistrer auprès du ministère des Migrations, lequel devait ensuite examiner si ces organisations répondaient aux critères requis par la loi. Au total, ce sont 137 ONG qui ont ouvert un compte auprès du registre ministériel dont 80 ont accompli la première étape de la procédure. Soixante-dix sont en cours d’examen dont seuls « 18 répondent jusqu’ici aux conditions requises », selon le ministère.
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Bien que de nombreux organismes aient salué la tentative du ministère de « mettre à jour » le registre des ONG et de « renforcer la transparence » du secteur, certains acteurs ont fait part de leur mécontentement dans une lettre adressée au ministère dont l’AFP a eu une copie. Le point principal de crispation concerne « les entraves bureaucratiques de la procédure d’enregistrement, ce qui pose des problèmes à l’accès sur le terrain pour secourir les migrants » et à « l’accès aux fonds » nécessaires pour leur action, rapporte l’AFP.
Des fonds européens directement alloués aux associations
En effet, en raison de l’urgence de la situation et du manque d’infrastructures adéquates en Grèce pour accueillir les centaines de milliers de migrants dont la majorité sont passés en Europe occidentale ces dernières années, l’Union européenne (UE) a octroyé des fonds directement aux ONG, qui avaient alors afflué dans le pays pour gérer la situation en coopération avec l’État grec. Ce dernier a progressivement pris de relais de la gestion de la majorité des services d’assistance aux demandeurs d’asile, comme prévu.
Une gestion critiquée par le ministre Notis Mitarachi qui a accusé la semaine dernière le précédent gouvernement de gauche d’Alexis Tsipras (2018-2019) d’avoir laissé « le champ libre à la gestion des fonds européens par les ONG » sans assez de contrôle de l’État.
Le ministre entendait ainsi défendre l’actuel gouvernement conservateur, sous le feu de critiques du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et d’autres ONG sur la gestion des camps surpeuplés sur les îles de la mer Égée. On estime à près de 35 000 le nombre de personnes qui s’entassent actuellement dans les camps sordides répartis sur cinq îles de la mer Égée – à l’image de Moria sur l’île de Lesbos – ou à la frontière terrestre avec la Turquie, comme le centre de l’Evros.
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Outre les conditions de vie dans les camps, les ONG dénoncent aussi le manque de logements en Grèce continentale alors que le gouvernement grec a repris ces derniers jours les transferts réguliers des demandeurs d’asile vers le Pirée, un port près d’Athènes. Faute de places suffisantes sur le continent, des dizaines de demandeurs d’asile ont commencé à camper à la belle étoile sur la place Victoria, dans le centre de la capitale.
Alors que les camps débordent et que de nouveaux campements se forment, les ONG se plaignent également, dans la lettre obtenue par l’AFP, de moins en moins réussir à accéder aux migrants pour leur porter assistance. Une récente décision ministérielle portant sur « le droit du rassemblement » risque, en effet, d’empêcher les bénévoles de secourir les migrants se trouvant à l’extérieur des camps comme c’est souvent le cas. Les ONG se préparent à un véritable bras de fer avec le gouvernement.
Sources : https://www.infomigrants.net/