À Lesbos, des milliers de migrants sans abri après les incendies du camp de Lesbos
Après les incendies survenus dans la nuit de de mardi à mercredi, un nouveau feu s’est déclaré mercredi soir dans le camp de migrants de Moria, sur l’île de Lesbos. Jeudi, des milliers de personnes se trouvaient toujours sur la route l’arrivée d’une aide d’urgence.
Sur l’île de Lesbos, où le camp de Moria a été ravagé par plusieurs incendies dans la nuit de mardi à mercredi puis de nouveau mercredi soir, des milliers de personnes migrantes attendaient toujours jeudi 10 septembre l’arrivée d’une aide humanitaire.
Au bord de la route reliant le camp au port de Mytilène, les personnes ont formé de longues files d’attente de trois kilomètres. Certaines ont pu emmener avec elles des affaires personnelles et notamment leur tente mais de nombreuses familles n’ont même pas de tentes et viennent de passer une seconde nuit à la belle étoile et à même le sol, manquant de tout, y compris de matelas et de produits de première nécessité.
Des personnes ont trouvé refuge « entre les tombes d’un cimetière orthodoxe », rapporte une journaliste sur Twitter. Certains migrants se sont, eux, réfugiés dans les champs d’oliviers environnants. D’autres, l’œil hagard, erraient dans les villages voisins à la recherche d’eau.
Alpha*, un jeune demandeur d’asile africain de 19 ans, a passé la nuit avec d’autres personnes originaires de son pays dans la rue. « On a mis des vêtements au-dessus de nous pour nous servir de tente », raconte-t-il à InfoMigrants.
La majorité des milliers de migrants sont sortis en panique des tentes et des conteneurs dans la nuit de mardi à mercredi. Alpha, lui, affirme avoir rassemblé ses affaires dès l’instant où il a senti l’odeur des gaz lacrymogènes qui ont été tirés mardi soir dans le camp.
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« Hier on avait acheté de la nourriture dans un supermarché Lidl, malheureusement ce matin, il y a eu la police qui est venue pour dire au dirigeant du magasin de fermer », déclare Alpha, ajoutant qu’aucune distribution de nourriture n’a été organisée pour les personnes qui ont dû évacuer le camp. Mais, selon le jeune homme, « des gens sont venus apporter des choses pour les bébés. Il y a plusieurs bébés, certains ont une semaine ou un mois.
À la mi-journée, de l’eau a finalement été distribuée sur le parking du supermarché Lidl où se sont retrouvées de nombreuses personnes migrantes.
« Nous avons tout perdu »
« Nous avons tout perdu », soupire Fatma Al-Hani, une Syrienne de Deir-Zor portant son enfant de deux ans dans les bras sur la route menant de Moria au petit port de Panagiouda.
« Nous sommes abandonnés à nous-mêmes, sans nourriture, sans eau, sans médicaments », ajoute cette jeune femme qui a juste réussi à sauver des flammes ses papiers d’identité.
« Où on peut aller ? », demande Mahmout, originaire d’Afghanistan. À côté de lui, sa compatriote Aisha cherche ses enfants: « Deux de mes enfants sont là, mais je ne sais pas où sont les autres ».
Le ministre grec des Migrations, Notis Mitarachi, avait souligné qu' »aucune victime » n’avait été signalée, saluant l’intervention des pompiers et policiers, tout en reconnaissant qu’au moins 3 500 migrants étaient sans abri.
« Nous prenons des mesures d’urgence pour ces personnes: les plus vulnérables, environ 1 000, seront hébergés sur un ferry », au port de Mytilène, chef-lieu de l’île, avait-il assuré.
Mais l’aide humanitaire n’est pas encore arrivé et Médecins sans frontières alerte sur les grands besoins de soins physiques et de santé mentale dont ont besoin les personnes migrantes. « Nous envoyons une seconde équipe dans notre clinique mobile aujourd’hui », a déclaré Faris Al-Jawad, contacté par InfoMigrants. « La première n’a pas pu accéder à la clinique, elle s’est vue bloquer la route par des locaux », a-t-il ajouté.
Des habitants et les autorités locales s’opposent en effet à l’installation provisoire de tentes en dehors du camp. « Nous faisons face à des difficultés de la part des autorités locales et des habitants », a déploré le vice-ministre Yiorgos Koumoutsakos.
Les autorités locales s’inquiètent aussi du fait que 35 cas de coronavirus avaient été détectés dans le camp de Moria avant l’incident et qu’ils risquent aujourd’hui de contaminer d’autres personnes. Faris Al-Jawad précise que 8 des 35 personnes infectées ont été identifiées mais souligne que « l’identification de ces personnes relève de la responsabilité du gouvernement grec et non de MSF ».
Transfert vers la Grèce continentale de 400 enfants et adolescents
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a souligné que l’UE se tenait « prête à aider ». La Commission a déjà annoncé qu’elle prenait en charge le transfert immédiat vers la Grèce continentale de 400 enfants et adolescents.
L’Allemagne, qui assure la présidence tournante de l’UE, a demandé aux pays membres d’accueillir des migrants du camp. Des milliers de manifestants ont exigé mercredi à travers l’Allemagne que leur pays prenne aussi en charge des migrants.
La présidente grecque Katerina Sakellaropoulou a appelé l’UE à ne « pas fermer les yeux ». « Les réfugiés et l’immigration sont d’abord un problème européen », a-t-elle ajouté dans un communiqué.
Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a attribué l’origine du désastre à « des réactions violentes contre les contrôles sanitaires » effectués après la détection de 35 cas de Covid-19 dans le camp.
Le premier cas de coronavirus avait été détecté à Moria la semaine dernière et le camp a été placé à l’isolement pour quinze jours.
Le camp hébergeait quelque 12 700 demandeurs d’asile, quatre fois sa capacité d’accueil, dont 4 000 enfants.
Lesbos, île de la mer Egée forte de 85 000 habitants, est la principale porte d’entrée des migrants en Grèce en raison de sa proximité avec la Turquie.
Sources : https://www.infomigrants.net/