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Accueil des mineurs non-accompagnés en France : le point sur leur prise en charge

Les déclarations se sont multipliées ces derniers jours sur les mineurs non-accompagnés, ces jeunes étrangers de moins de 18 ans, arrivés seuls en France et qui n’ont pas de représentant légal. Le débat sur leur prise en charge a été relancé après l’agression de deux personnes près des anciens locaux de Charlie Hebdo par un jeune Pakistanais qui s’était déclaré mineur à son arrivée en France. InfoMigrants fait le point sur la situation de ces jeunes.

« Il y a un drame des mineurs isolés » migrants, déclarait le 29 septembre le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, quelques jours après l’attaque au hachoir qui a fait deux blessés graves près des anciens locaux de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo.

Cet événement a relancé en France le débat sur l’accueil et la prise en charge des mineurs non-accompagnés (MNA) en France. InfoMigrants répond aux questions les plus courantes à ce sujet.

Comment sait-on que ces jeunes sont mineurs ?

Les jeunes qui arrivent en France et se déclarent mineurs doivent passer une évaluation de leur minorité. Ce sont les départements qui sont responsables de cette étape. Certains départements effectuent eux-mêmes cette évaluation à travers leur service d’Aide sociale à l’enfance (ASE), d’autres ont désigné des associations pour s’en charger. C’est le cas à Paris où l’évaluation des jeunes se fait par le Demie (Dispositif d’évaluation des mineurs isolés étrangers) de la Croix rouge.

>> À lire : Mineurs isolés : tout savoir sur votre prise en charge à votre arrivée en France

L’évaluation des jeunes repose sur leur témoignage et les éventuels documents administratifs qu’ils peuvent présenter. Devant les examinateurs, ils racontent les raisons de leur départ, leur parcours et leur vie dans leur pays. Ceux qui ne sont pas déclarés « majeurs » à l’issue d’un premier entretien, en passent un deuxième.

« La deuxième évaluation repose sur plusieurs critères : état civil, composition familiale, conditions de vie dans le pays d’origine, motif de départ, présentation du parcours migratoire, conditions de vie en France, projet en France. Cet entretien dure en moyenne une heure », précisait la directrice du Demie 75, Stéphanie Leroux, en 2018 à InfoMigrants.

En 2019, 16 760 jeunes ont été pris en charge par l’ASE dans l’ensemble des départements, selon l’Assemblée des départements de France.

Que se passe-t-il pour ceux qui affirment être mineurs mais dont l’évaluation a conclu qu’ils étaient majeurs ?

Ils ont la possibilité de déposer un recours devant un juge des enfants. Après avoir examiné leurs documents administratifs et les avoir reçu lors d’une audience, celui-ci décide de reconnaître ou non leur minorité.

Mais les délais sont longs et les jeunes, dans l’attente de leur audience devant le juge, sont sans solution d’hébergement. « En moyenne, à Bobigny, [un recours] prend maximum six mois. À Evry, ça peut prendre 14 mois, pareil à Nanterre. À Paris, on a réduit les délais, là on est à quatre mois mais avant on était plutôt à neuf mois d’attente », détaille Ludivine Erragne, responsable du plaidoyer juridique de la mission France de Médecins sans frontières (MSF) dédiée au mineurs non-accompagnés.

En cas de réponse négative du juge des enfants, les jeunes peuvent faire appel. Mais là encore les délais vont de six mois à un an d’attente pendant lesquels les jeunes sont livrés à eux-mêmes.

D’où viennent-ils ?

La plupart des mineurs non-accompagnés en France sont originaires d’Afrique subsaharienne (Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Tchad, Burkina Faso…). De nombreux jeunes viennent aussi d’Afghanistan et du Pakistan et, dans une moindre proportion des pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie).

Dans l’immense majorité des cas, il s’agit de garçons, les jeunes filles arrivant seules en France sont très rares.

Pourquoi sont-ils partis ?

Les raisons du départ des jeunes sont diverses mais elles peuvent être regroupées en plusieurs catégories. Certains jeunes ont quitté leur pays en raison des violences qui s’y déroulent, cela peut-être la cas des Afghans, des Pakistanais ou bien des Maliens.

>> À lire : Guinée : quand les jalousies familiales poussent les jeunes au départ 

D’autres ont choisi de fuir un pays où ils étaient menacés en raison de leur orientation sexuelle.

Un grand nombre de jeunes Africains affirment être partis de chez eux pour fuir des situations familiales très compliquées dans lesquelles ils étaient parfois victimes d’abandon et de mauvais traitements.

Enfin, d’autres jeunes se décident à partir en Europe avec le rêve de pouvoir suivre une scolarité complète et ensuite de trouver un travail.

Doivent-ils demander l’asile pour pouvoir rester en France ?

Pas nécessairement. En vertu de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) de 1989 dont la France est signataire et de l’article 375 du code civil français, un jeune reconnu mineur en France doit être pris en charge (logé, nourri et scolarisé) même s’il n’a pas obtenu une protection internationale.

Cependant, certains jeunes en font la demande s’ils ont fui leur pays en raison de violences liées à la situation politique du pays, à leur orientation sexuelle ou bien à leur religion. « C’est rarement le cas chez les jeunes d’Afrique de l’ouest car l’asile entraîne une rupture avec le pays d’origine qu’ils ne souhaitent pas », souligne Ludivine Erragne.

Les tests osseux, parfois réclamés par des juges, sont-ils fiables pour évaluer l’âge d’un jeune ?

Pour de nombreuses associations et ONG, ainsi que pour une grande partie des professionnels de santé, ces tests ne devraient pas être utilisés pour déterminer l’âge d’un jeune.

« Ces tests ne sont pas fiables du tout. Il y a une marge d’appréciation de deux ans et ils ont été établis à partir d’une référence caucasienne des années 1930 », dénonce Ludivine Erragne. « C’est même au delà de pas fiable, c’est honteux. Toute la communauté médicale s’entend à les dénoncer. »

Selon elle, l’origine des jeunes mais aussi les épreuves qu’ils ont traversées durant leur parcours migratoire peuvent tout à fait avoir pour effet de les « vieillir » au regard de ces tests. Sans compter que pour des jeunes seuls dans un pays étranger et qui, parfois, n’ont jamais fait d’examens médicaux de leur vie, la réalisation de ces tests peut être vécue comme un moment très angoissant.

Sources :https://www.infomigrants.net/

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