Mer Méditerranée : Malte refuse de coordonner le sauvetage de 86 migrants en détresse
Le voilier Nadir de l’ONG Resqship, qui n’est pas habilité à secourir des migrants en mer, a toutefois assisté mercredi 86 personnes en détresse en mer Méditerranée. Contactées à plusieurs reprises, les autorités maltaises ont refusé de « coordonner » le sauvetage de l’embarcation. Après des heures en détresse, les exilés ont finalement été pris en charge par les garde-côtes italiens.
L’alerte avait été donnée par la plateforme d’aide aux migrants en mer Alarm Phone. « Quatre-vingt personnes sont à la dérive dans les eaux maltaises. Le moteur s’est arrêté et le bateau dérive », a rapporté le collectif sur son compte Twitter mercredi 16 juin
Quelques heures plus tard, l’embarcation est localisée par le navire de l’ONG allemande Resqship. Le voilier Nadir, qui remplace le Josefa, était parti lundi pour sa première mission d’observation en Méditerranée centrale et n’était dans la zone que depuis 24 heures lorsqu’il a repéré le canot en bois. À son bord, 86 migrants, dont plusieurs enfants et trois femmes enceintes, partis de Libye deux jours plus tôt.
« Menaces » des garde-côtes libyens
Le Nadir contacte alors le centre de coordination et de sauvetage maltais (MRCC) pour prendre en charge les naufragés, mais La Valette « refuse de coordonner » le sauvetage, indique l’organisation. Le voilier de 18 mètres n’est pas équipé pour accueillir autant de personnes et n’a pu embarquer à son bord que la moitié du groupe, les plus vulnérables. Les autres ont reçu des gilets de sauvetage et sont restés dans le canot, sous la surveillance des humanitaires.
« Nous ne sommes pas un navire de sauvetage, (les migrants) doivent être transférés sur un plus gros navire et amenés dans un port sûr », insiste Resqship.
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Après des heures sans coordination, les autorités maltaises ont informé le Nadir de l’arrivée imminente d’un navire marchand, qui se trouvait à proximité, pour les soutenir. Mais ce bateau n’est jamais arrivé sur zone. A la place, l’équipage a vu débarquer les garde-côtes libyens.
Ils « ont menacé les personnes en détresse ainsi que les membres de notre équipage et les ont exhorté à transférer (les migrants) sur le navire libyen afin qu’ils soient transférés en Libye », déclaré un porte-parole de l’ONG au média maltais Newsbook.
Le Nadir a refusé de coopérer, affirmant qu’un tel procédé est « hautement illégal » car il représente une « violation du droit maritime et une grave atteinte aux droits humains », poursuit le porte-parole.
Face à l’urgence de la situation et l’absence de réponse de Malte, le voilier s’est dirigé mercredi soir vers Lampedusa, en remorquant le canot.
Jeudi matin, « énorme soulagement à bord du Nadir », s’est réjouit Resqship. Un navire des garde-côtes italiens a pris en charge les naufragés en pleine mer pour les transférer dans un port du pays.
Malte, déjà épinglée pour ses « tactiques illégales » en mer Méditerranée
Ce n’est pas la première fois que Malte refuse de coordonner le sauvetage d’une embarcation en détresse dans ses eaux. Dans un rapport publié en septembre, Amnesty International dénonçait déjà les pratiques des autorités maltaises, l’accusant de « tactiques illégales » en Méditerranée pour empêcher l’arrivée de migrants effectuant la dangereuse traversée depuis l’Afrique du Nord. L’ONG évoquait notamment « l’organisation de refoulements illégaux vers la Libye, le détournement de bateaux vers l’Italie plutôt que le sauvetage de personnes en détresse ».
En novembre, 50 migrants ont attaqué en justice le gouvernement maltais pour violation de leurs droits. Ces exilés estiment que La Valette a sciemment orchestré l’interception de leur canot par un navire marchand avant d’ordonner leur retour en Libye, où ils risquent d’être victimes de violences et de torture dans les centres de détention du pays.
Sources : https://www.infomigrants.net/