L’armée française a annoncé dimanche l’ouverture d’une enquête après un incident dans un camp de migrants à Calais, dans le nord de la France. Un véhicule militaire a été filmé en train de multiplier les dérapages en face d’un campement où vivent quelque 500 exilés avant de s’embourber dans une ornière. L’état-major des armées a estimé que le conducteur « a eu un comportement totalement inapproprié en se livrant à des manœuvres dangereuses », promettant des « sanctions appropriées (…) en fonction des responsabilités qui seront établies ».
C’est une vidéo dont l’armée de terre se serait bien passée. Des images publiées sur Twitter dimanche 19 décembre par le photojournaliste Louis Witter, et vues plus d’un million de fois en à peine 24 heures, mettent l’armée en mauvaise posture. On peut y voir un 4×4 marron, dont le pare-brise est orné d’un bandeau « circulation mission Vigipirate » et qui porte une plaque d’immatriculation militaire, réaliser des arabesques en marche arrière dans un champ boueux situé « sur un terrain vague à la sortie de Calais », indique le photojournaliste.
Sur la vidéo, le véhicule lancé à pleine vitesse sur le terrain boueux, passe aussi dans des grosses flaques provoquant d’immenses gerbes d’eau sur les côtés. En arrière plan, on aperçoit les tentes d’un camp de migrants où survivent près de 500 personnes.
Une fois arrêtés, les militaires sont sortis du véhicule, armes à la main, en attendant de l’aide pour sortir le véhicule de la boue. « Avant d’appeler un plus gros camion [de l’armée, ndlr] ils ont demandé, un peu emmerdés, ‘Vous avez pas des pelles ?’ », continue le photojournaliste.
Au bout de quelques heures, et plusieurs tentatives échouées, le véhicule, coincé jusqu’à la mi-portière, a finalement été dégagé par des militaires aidés par des migrants.
« Un comportement totalement inapproprié »
L’état-major des armées a « fermement » condamné les faits dans un communiqué. Le conducteur du véhicule « a eu un comportement totalement inapproprié en se livrant à des manœuvres dangereuses », a-t-il estimé, promettant des « sanctions appropriées (…) en fonction des responsabilités qui seront établies ».
Pour les associations, cet épisode met en lumière la « déconnexion [avec] le quotidien des migrants », selon Nikolaï Posner, d’Utopia 56.
Un autre humanitaire a rappelé à l’AFP que « ce véhicule militaire s’amuse au milieu d’un lieu de vie où les distributions de nourriture et d’eau [par les associations, ndlr] sont interdites par la préfecture sous peine de verbalisation ».
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Depuis septembre 2020, les associations ne peuvent plus distribuer de vivres dans certaines zones de Calais. Pour la préfecture, cette mesure vise à limiter les rassemblements favorables à la diffusion du Covid-19 « dans un contexte sanitaire fragile » mais aussi à empêcher « les troubles à l’ordre public ».
Les migrants se massent depuis des années sur le littoral français dans l’espoir de rallier le Royaume-Uni en traversant la Manche sur des embarcations de fortune. Depuis fin 2018, les tentatives de traversées illégales se sont fortement multipliées.
De janvier à fin novembre, la préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord a comptabilisé 1 281 événements (sauvetages, naufrages, interceptions…) liés à des traversées vers l’Angleterre impliquant 33 083 personnes. Les autorités françaises ont secouru 8 284 naufragés. Au total, 30 personnes sont décédées et quatre ont été portées disparues.
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