Les associations d’aide aux migrants belges se démènent depuis deux semaines pour tenter de mettre à l’abri les migrants à la rue afin de les protéger du coronavirus, faute de solutions apportées par les autorités. Elles s’inquiètent également de leurs droits jugés bafoués.
En Belgique, le sort des migrants en temps de crise sanitaire provoque l’inquiétude. « Avec cette crise, les associations essayent de réparer les choix politiques qui ont mené à l’exclusion des migrants », déclare à InfoMigrants Sotieta Ngo, directrice de l’association belge Ciré.
Même son de cloche du côté de la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés : « Les autorités ont marginalisé tout un pan de la population », estime son porte-parole Mehdi Kassou, joint par InfoMigrants. « Rien n’a été fait au niveau fédéral pour protéger les migrants. Depuis le début de l’épidémie de coronavirus, Maggie De Block (ministre des Affaires sociales, de la Santé publique, de l’Asile et des migrations, NDLR) est restée silencieuse sur les questions d’asile. »
Impossibilité de déposer l’asile
Bruxelles a bien pris des mesures, mais elles sont jugées « scandaleuses » par les associations. Au premier jour du confinement décrété par le gouvernement en raison de l’épidémie de coronavirus, le 18 mars, les autorités ont fermé l’Office des étrangers, lieu de dépôt des demandes d’asile. Il n’est donc – pour l’heure – plus possible de faire de demande d’asile en Belgique.
Ainsi, les nouveaux demandeurs d’asile ne peuvent plus être pris en charge par l’Etat dans le dispositif national d’accueil, qui comprend notamment le logement, les soins médicaux et une aide financière. Ils se retrouvent de fait à la rue et sans-papiers.
Autre sujet de crispation pour les humanitaires : le non-renouvellement des titres de séjour pour les étrangers. Plusieurs pays touchés par le coronavirus, comme la France, ont prolongé de trois mois les titres de séjour mais en Belgique, les étrangers doivent faire la demande par mail et justifier leur motif. Une mesure jugée « incompréhensible » par les associations.
Les centres fermés occupés à 50%
Concernant les centres fermés – l’équivalent des centres de rétention administratives (CRA) en France – les associations se disent là-aussi inquiètes. Ces structures sont en effet toujours occupées par des migrants en vue de leur expulsion. « Les centres fermés sont occupés à 50%, par des étrangers sortis de prison. Les autres ont été libérés mais avec un ordre de quitter le territoire sous 30 jours. Même s’ils le voulaient, c’est impossible, les frontières sont fermées ! », signale Sotieta Ngo qui ajoute que les associations ont vu leur droit de visite dans ces centres suspendu. « On ne sait pas ce qu’il s’y passe et si les mesures sanitaires sont bien respectées. »
De plus, les migrants libérés de ces centres fermés ont été « lâchés dans la nature ». Résultat : beaucoup d’entre eux se sont réfugiés aux abords du parc Maximilien, lieu de rassemblement des migrants à Bruxelles.
Un millier de migrants mis à l’abri par les associations
Face à l’absence de réponses de l’Etat, les associations se sont donc mises en ordre de bataille, avec l’aide des régions. La Plateforme citoyenne, qui gère notamment l’hébergement des migrants à la rue, a dû s’adapter et augmenter ses capacités d’accueil.
Son centre de la Porte d’Ulysse, en banlieue bruxelloise, d’ordinaire ouvert de 19h à 11h, l’est désormais 24h/24 et tourne à plein régime avec 305 migrants hébergés. « Dans les dortoirs, on a espacé les lits de plus d’un mètre pour respecter les mesures de distanciation », précise Mehdi Kassou. « On a aussi créé des espaces dédiés aux personnes présentant des symptômes du coronavirus avant de les orienter vers le Samu ou la Croix-Rouge », ajoute-t-il.
La Plateforme a également développé son réseau en mettant à l’abri 200 migrants dans des hôtels de la capitale belge, et 250 autres chez des citoyens. En région, des bâtiments ou des maisons inoccupés ont été réquisitionnés pour y loger les migrants et leur permettre de se confiner. Ainsi, plus de 250 personnes ont pu être hébergées.
Malgré la mise à l’abri par la Plateforme citoyenne et les régions d’environ un millier de personnes, une centaine de migrants étaient encore massés lundi soir aux abords du parc Maximilien, sans solution d’hébergement, affirme Mehdi Kassou.
Sources : https://www.infomigrants.net/