Des centaines de personnes migrantes vivent sans hébergement dans le nord-ouest de la Bosnie alors que les premières neiges sont arrivées et que les températures descendent en dessous de zéro. Beaucoup continuent à tenter de franchir la frontière croate mais se heurtent à des violences policières systématiques.
« S’il vous plaît aidez-nous, cette femme ne peut plus marcher et ce garçon, il a besoin de médicaments, il doit aller à l’hôpital », implore un homme au milieu d’un groupe de personnes migrantes réunies sous la neige. La scène se passe le mercredi 2 décembre à la frontière bosno-croate. Plusieurs familles ont décidé de manifester pour dénoncer les refoulements dont elles ont été victimes en Croatie.
Elles sont bloquées depuis plusieurs mois dans le nord-ouest de la Bosnie et espèrent entrer dans l’Union européenne (UE). Plusieurs fois, elles ont franchi la frontière mais n’ont pas été autorisées à déposer une demande d’asile en Croatie, affirme l’association No name Kitchen à qui elles ont remis la vidéo.
Selon l’association, une soixantaine de familles vivaient sans hébergement dans les environs de Bojna. « On disait à ces familles qu’il n’y avait pas de place pour elles dans les centres et finalement elles ont été envoyés de force la semaine dernière dans le centre Hotel Sedra la semaine dernière », affirme Alba Dominguez, membre de No Name Kitchen, contactée par InfoMigrants.
Pieds nus dans le froid
A l’instar de ces familles, des centaines de personnes migrantes ont été expulsées de Croatie sans avoir eu la possibilité de déposer une demande d’asile et renvoyées en Bosnie. Ces situations, déjà inhumaines en temps normal, sont rendues encore plus difficiles par l’arrivée de l’hiver.
« À chaque fois que la police croate trouve des personnes [qui tentent d’entrer en Croatie], ils les renvoient mais avant ça, ils leur prennent leurs affaires, les déshabillent et leur volent leur argent. Les gens doivent repartir dans la nuit, dans le froid, souvent pieds nus, sans argent et sans documents d’identité. C’est comme un cycle, où les personnes migrantes n’arrêtent jamais de perdre des choses et de subir des violences policières », dénonce Alba Dominguez.
« Certaines pratiques s’apparentent vraiment à de la torture. Comme quand les policiers, après avoir arrêté des personnes, les enferment presque déshabillées dans une voiture et allument l’air froid. »
« La situation est encore pire que l’année dernière »
La situation est d’autant plus difficile que tous les centres d’hébergement pour personnes migrantes du canton d’Una Sana – frontalier de la Croatie – sont pleins.
Selon Peter Van der Auweraert, coordinateur de la mission de l’Organisation internationale pour les Migration (OIM) en Bosnie-Herzégovine, sur les quelque 8 000 personnes migrants actuellement dans le pays, environ 1 500 se trouvent sans hébergement dans le canton d’Una Sana, frontalier de la Croatie.
Ces personnes vivent soit dans en forêt, sous des tentes ou des abris de fortune, ou bien dans des bâtiments abandonnés et des squats.
« Cette année, la situation est encore pire que l’année dernière [quelques 700 personnes avaient vécu une partie de l’hiver dans le camp de Vujcak dans des conditions totalement inhumaines ndlr] car nous devons trouver une solution d’hébergement pour les 1 500 personnes qui vivent dehors mais aussi pour les 1 400 hommes seuls du centre de Lipa », souligne Peter Van der Auweraert, joint par InfoMigrants.
Les centres d’hébergement sont pleins en Bosnie et Serbie
Ouvert en avril dernier, ce centre d’hébergement n’est équipé ni de l’électricité, ni de l’eau courante. « La situation à l’intérieur du camp n’est pas tenable », dénonce le responsable de l’OIM qui raconte que la tente qui sert de lieu de prière s’est effondrée il y a quelques jours en raison du vent violent. Selon lui, la seule solution est l’ouverture d’un nouveau centre d’hébergement.
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Parmi les personnes migrantes, un certain nombre ont choisi de quitter le canton d’Una Sana à l’approche de l’hiver pour se diriger vers Sarajevo dans le centre du pays dans l’espoir de trouver une place d’hébergement. Mais à Sarajevo aussi les structures d’accueil sont pleines, déplore Peter Van der Auweraert.
Anas fait partie des personnes qui ont choisi de rejoindre la Serbie voisine, après plusieurs mois passés en Bosnie. « Je suis resté un mois dans le centre d’hébergement de Sarajevo, ensuite je suis allé à Velika Kladusha (nord) pour tenter de passer en Croatie. Mais la police m’a renvoyé vers la Bosnie. Et quand le climat est devenu vraiment froid, je suis parti après en Serbie », a raconté ce jeune Syrien à InfoMigrants.
Mais la situation en Serbie n’est pas celle que le jeune homme attendait. Privé de documents d’identité, Anas peine à trouver à manger tous les jours. Et le camp de Subotica, à la frontière serbo-hongroise, où il a trouvé provisoirement refuge, est déjà plein. « Je peux être mis dehors du jour au lendemain. »
Sources : https://www.infomigrants.net/