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« Pushbacks » dans les Alpes françaises : quand les migrants dénoncent les renvois immédiats vers l’Italie

De nombreux migrants interceptés dans la montagne, côté français – vers Montgenèvre – racontent que les forces de l’ordre refusent de prendre en compte leur demande d’asile et les refoulent immédiatement vers l’Italie voisine.

Paul*, un jeune Camerounais de 24 ans, se rappelle « parfaitement » de cette nuit du mois de février, quelque part dans la montagne vers Montgenèvre, dans les Alpes françaises. Le jeune homme tentait d’entrer en France depuis l’Italie voisine quand la Police aux frontières [PAF] l’a interpellé. « J’ai vu des policiers s’avancer vers moi et m’arrêter. C’était lors de ma première tentative de traversée. Quand je les ai vus, j’ai tout de suite dit : ‘asile, asile’. Ils m’ont dit : ‘Non, toi, tu ne demandes pas l’asile’. Et ils m’ont renvoyé en Italie. »

Paul ne s’est pas découragé. Quelques jours plus tard, il a retenté la traversée des Alpes et est parvenu à entrer en France sans être arrêté. « J’aimerais m’installer en Bretagne », confie le Camerounais. « Je vais déposer ma demande d’asile dans les prochains jours et si tout va bien, j’irai m’installer là-bas. »

Le comportement des policiers français – qui refouleraient les migrants sans les laisser demander l’asile – serait fréquent selon les migrants interrogés. « Les pushbacks entre l’Italie et la France, on en a entendu parler, bien sûr. C’est pour ça qu’on a peur de la police dans les montagnes. Parce qu’ils n’écoutent rien », explique à son tour Mohamed* un Tunisien, rencontré lui aussi au Refuge solidaire de Briançon. Contrairement à Paul, Mohamed a réussi la traversée des Alpes du premier coup, sans rencontrer ni forces de l’ordre, ni maraudeurs-citoyens. « On a eu de la chance. Nous avons marché pendant 8 heures et tout s’est bien passé malgré le froid. On voyait passer les voitures de la police mais on se cachait, ils ne nous ont pas vus. »

« Refoulements très fréquents »

Le non-respect du droit d’asile est régulièrement dénoncé par les membres de l’association « Tous Migrants ». « Ici les refoulements sont très fréquents […] Ce qu’il se passe le plus souvent, c’est que la police arrête les migrants dans la montagne en France, les emmène à la PAF de Montgenèvre et leur distribue des OQTF. Ensuite, ils appellent les Italiens qui viennent cherchent les migrants et les ramènent en Italie […] Tout ça en moins de 5 heures », résume en deux phrases Pâquerette Forest, la co-présidente de l’association.

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Selon la loi, la Police aux frontières est autorisée à contrôler les papiers des personnes entrant sur le territoire français, elle peut donc expulser toute personne en situation irrégulière. On parle dans ce cas de « non admis ». En revanche, elle ne peut expulser un étranger qui demande l’asile. Dans ce cas précis, la Police aux frontières doit alors enregistrer la demande d’admission au titre de l’asile et transmettre le dossier au ministère de l’Intérieur, compétent pour accepter ou refuser l’entrée en France, basant sa décision sur avis de l’Ofpra.

La PAF de Montgenèvre, février 2021. Crédit : Mehdi Chebil
La PAF de Montgenèvre, février 2021. Crédit : Mehdi Chebil

« Il y a un véritable déni de droits ici », continue Pâquerette Forest, en nuançant toutefois ses propos. « Tous les policiers ne sont pas comme ça. Il y a ceux qui laissent passer les migrants pour qu’ils puissent demander l’asile et il y a ceux qui s’acharnent. » Selon elle, « ceux qui s’acharnent » sont « rares » mais leur comportement a des conséquences graves. « Il y a eu des policiers qui déchiraient les documents officiels des migrants, comme leur acte de naissance », des documents ô combien importants pour entamer des démarches administratives en France.

>> A relire : Traversée des Alpes : « On était perdus, je m’enfonçais dans la neige jusqu’aux genoux » (2/4)

« Les pushbacks ne les découragent pas »

« Surtout, à force de subir des pushbacks, les migrants prennent de plus en plus de risques », renchérit à ses côtés, Juliette, une maraudeuse de l’association, qui connaît très bien la montagne et ses dangers. « Les migrants prennent des chemins de plus en plus escarpés, de plus en plus hauts, de plus en plus loin », s’inquiète-t-elle. « Il faut arrêter de croire que les pushbacks les découragent. Ça ne les décourage pas. Nous parlons de migrants qui ont été refoulés en Bosnie, en Croatie jusqu’à 10 fois, 20 fois avant de réussir à passer ! Ce n’est pas les Alpes et les policiers qui vont les arrêter ! »

Contactée par InfoMigrants, la Police aux frontières a refusé de nous laisser entrer dans ses locaux à Montgenèvre, à moins de 5 kilomètres de l’Italie, et de répondre à nos questions.

La préfecture des Hautes-Alpes a également refusé de répondre à nos sollicitations, mais nous a communiqué des chiffres. En 2020, 80 refus de séjour et OQTF ont été prononcés dans les Hautes-Alpes. Et 1576 personnes ont été « non admis » sur le territoire français.

Sources : https://www.infomigrants.net/

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