Le corps d’un jeune homme originaire de Guinée a été retrouvé, samedi matin, dans le fleuve Bidassoa qui marque la frontière entre la France et l’Espagne. Les pompiers ont indiqué avoir repêché le corps d’un homme au niveau du pont international de Béhobie. En un an et demain, il s’agit de la dixième personnes morte en tentant de franchir la frontière.
C’est un nouveau drame à la frontière entre l’Espagne et la France. Le corps d’un homme d’origine subsaharienne a été retrouvé, samedi 18 juin, dans le fleuve Bidassoa, frontière naturelle entre la France et l’Espagne. Selon le Diario vasco, il s’agit d’Abderraman Bas, un jeune Guinéen de 25 ans. Il était arrivé au Pays basque, depuis l’île de Lanzarote, dans l’archipel espagnol des Canaries, au mois de mai dernier, précise Sud Ouest.
Les pompiers ont d’abord expliqué avoir repêché le corps d’un homme au niveau du pont international de Béhobie après avoir été prévenus vers 6h du matin et l’avoir confié aux autorités côté espagnol, à Irun. Le corps aensuite été déposé sur la berge espagnole où il a été pris en charge par la garde civile espagnole. Selon elle, le corps se trouvait encore « en bon état » ce qui laisse supposer que la date de la mort est assez récente.
Ce jeune homme est la dixième personne morte en tentant de franchir le fleuve pour atteindre la France en un an et demi, rappelle France bleu.
« Rien ne bouge »
« Je ne sais pas encore si c’est un migrant mais en tout cas les précédents corps retrouvés dans le fleuve étaient ceux de migrants », a, de son côté, indiqué à l’AFP Philippe Aramendi, le maire d’Urrugne, la commune française où se trouve le pont de Béhobie.
« Au moins 7 ou 8 personnes migrantes sont décédées ces derniers mois en tentant de traverser à la nage la Bidassoa », un fleuve « qui est très dangereux avec des courants énormes « , a-t-il ajouté.
« Cela fait des mois et des mois que l’on s’émeut de cette situation mais rien ne bouge. Au contraire, les contrôles à la frontière sont toujours plus renforcés et on se croirait en état de siège », a déploré l’élu, de la tendance abertzale (gauche patriote basque), regrettant que « des gens qui essaient d’aider ces migrants sans contrepartie, simplement au nom de la fraternité, sont parfois arrêtés ».
Dimanche midi, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés sur la place San Juan d’Irun pour rendre hommage au jeune exilé décédé. À cette occasion, le maire d’Irun, José Antonio Santano, a dénoncé une « hémorragie de jeunes vies perdues dans le fleuve Bidassoa ». « Ils se jettent à l’eau pour éviter les contrôles féroces aux frontières. Si tel est le problème nous devons trouver une solution », a-t-il plaidé.
Le dernier drame de ce type remonte au mois de mars lorsqu’un migrant avait été porté disparu puis retrouvé mort dans le fleuve quelques jours plus tard. Trois exilés avaient tenté de franchir le fleuve mais seuls y étaient parvenus.
La Bidassoa, de plus en plus empruntée
La traversée de la Bidassoa est de plus en plus empruntée à mesure que les contrôles policiers ont été renforcés sur terre. « Ici il y a plus de policiers que de voyageurs », avait assuré un passant à InfoMigrants, en juin 2021, à la frontière franco-espagnole. Sur le pont Saint-Jacques, qui sépare la ville espagnole d’Irun à la française Hendaye, « les personnes étrangères ont beaucoup de mal à passer », avait observé ce Français.
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D’après Émilie Pesselier, coordinatrice des frontières intérieures pour l’Anafé, « les effectifs des autorités aux frontières intérieures françaises sont beaucoup plus importants, nous le voyons sur le terrain », avait-elle affirmé à InfoMigrants. Le dispositif mis en place au nom de la lutte contre le terrorisme « engendre plutôt, dans les faits, la multiplication des contrôles discriminatoires, sur des personnes qui ont des droits ».
Plusieurs accidents sont survenus en 2021. Trois migrants, dont un Ivoirien et un Guinéen, se sont noyés dans la Bidassoa. Et, en octobre, trois Algériens sont morts percutés par un train à Ciboure, à quelques kilomètres de la frontière, pour échapper eux aussi à des contrôles de police.
En 2021, le nombre de non-admissions à la frontière franco-espagnole dans le département des Pyrénées-Atlantiques, a bondi de 120 % par rapport à 2020 (13 164 contre 5 976), selon la préfecture.
Parmi ces migrants, plus de la moitié sont originaires des pays du Maghreb, et un tiers de pays francophones d’Afrique subsaharienne (Mali, Guinée, Côte d’Ivoire, Sénégal), indiquent les autorités françaises.
Samedi, des militants de l’association Bizi ont recouvert les panneaux d’entrée de la ville de Bayonne. « En réaction à la publication de la liste des morts et disparus sur les voies de la migration depuis 2014 par l’Organisation Internationale pour les migrations », a expliqué à Sud ouest l’association écologiste et sociale. « 49 348 disparus depuis 2014, c’est comme si la ville de Bayonne disparaissait de la carte ! », souligne l’organisation.
Sources : https://www.infomigrants.net/