Les dirigeants autrichien, hongrois et serbe se sont entendus, lundi 3 octobre, pour une action conjointe à leurs frontières. Objectif affiché : endiguer le flux de migrants qui tentent de joindre l’Europe de l’Ouest via la route migratoire des Balkans.
La Hongrie, l’Autriche et la Serbie sont disposées à mettre en place des initiatives conjointes dans le but de diminuer le nombre d’arrivées de migrants dans leurs pays respectifs.
Ce « plan d’action » comprend notamment une coopération policière accrue le long de leurs frontières respectives mais aussi de celle de la Macédoine du Nord, ainsi qu’un soutien à la Serbie dans ses futures expulsions de migrants vers leur pays d’origine.
Vienne fournira » [son] savoir-faire technique « , et « fera aussi tout ce qui est nécessaire pour soutenir financièrement » la Serbie, a déclaré le chancelier autrichien, Karl Nehammer, à l’issue d’une rencontre à Budapest avec ses deux homologues lundi 3 octobre. » Tant que la lutte contre l’immigration clandestine et la contrebande, ainsi que les retours depuis l’Union européenne ne fonctionneront pas, nous devons tout faire pour protéger ensemble les frontières, a-t-il par ailleurs écrit sur Twitter. La coopération avec la Serbie et la Hongrie est particulièrement importante « .
La semaine dernière déjà, l’Autriche avait annoncé le rétablissement des contrôles à sa frontière avec la Slovaquie, dans l’Est, et des patrouilles supplémentaires dans l’Ouest, côté suisse.
Le dirigeant a également salué les déclarations du président serbe Aleksandar Vucic, selon lesquelles la Serbie alignerait sa politique des visas sur celle de l’Union européenne (UE) d’ici la fin de l’année. » Cela empêchera que la Serbie serve de voie de migration illégale vers l’Ouest « , avait déclaré Aleksandar Vucic.
Certains ressortissants hors UE – à l’instar des Indiens – n’ont en effet pas besoin de visas pour se rendre en Serbie. Une situation à l’origine de l’augmentation du nombre de migrants sur la route migratoire des Balkans, sous-entendent donc Karl Nehammer et son gouvernement. D’après ce dernier, parmi les migrants récemment détenus en Autriche ayant demandé l’asile pour éviter une expulsion immédiate, les Indiens représentaient le groupe le plus important en septembre.
De concert avec l’Allemagne, la Croatie et la Slovénie, l’Autriche et la Suisse entendaient d’ailleurs la semaine dernière intervenir auprès de la Commission européenne pour que les États des Balkans occidentaux adaptent leur politique en matière de visas, responsable selon eux de la situation actuelle.
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Selon Frontex, l’agence des frontières de l’espace Schengen, le passage par les Balkans est actuellement la route migratoire » la plus active dans l’UE, avec 15 900 tentatives de passages en août, soit 141 % de plus que l’année dernière « . Au cours des huit premiers mois de cette année, 86 581 entrées au total ont été détectées aux frontières extérieures de l’Union européenne.
Des « hotspots » en dehors de l’UE
De son côté, le président hongrois ouvertement anti-migrants, Viktor Orban, a appelé à un changement politique global dans la manière d’aborder la migration. Il a suggéré la création de centres dits « hotpots » en dehors de l’UE, afin d’y traiter les demandes d’asile. » Nous ne sommes pas du tout satisfaits de l’évolution de la situation « , a-t-il ajouté.
Une procédure irréalisable aux yeux du droit international sur l’asile, et qui porterait atteinte aux lois nationales de certains pays européens, dont l’Allemagne par exemple. Le pays a inscrit dans sa Constitution le droit de tout étranger de demander l’asile politique et de voir sa demande vérifiée individuellement pendant son séjour dans le pays.
La mesure présentée par le président hongrois est régulièrement mise en avant par des politiciens de droite et d’extrême-droite, y compris en France. Lors de la dernière élection présidentielle, la candidate des Républicains, Valérie Pécresse, l’avait inclus à son programme.
Cela traduit la méconnaissance des politiques de la réalité vécue par les exilés dans leur pays d’origine. Car tous n’ont pas la possibilité de déposer une demande d’asile dans leur pays ou dans un pays voisin, pour diverses raisons. Parmi elles figurent » l’absence de possibilité matérielle ou financière, la peur d’être identifiés comme souhaitant venir en France en tant que réfugiés, l’insécurité, l’incertitude sur le pays auprès duquel ils souhaitent demander l’asile « , rappelle l’organisation non gouvernementale Amnesty International.
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Le plan d’action partagé par la Hongrie, l’Autriche et la Serbie intervient dans un contexte de surveillance accrue aux frontières de l’Europe centrale. La semaine dernière, la République Tchèque a annoncé des contrôles supplémentaires à sa frontière avec la Slovaquie, pour empêcher les migrants d’entrer.
Plus précisément, » les contrôles seront réintroduits à 27 anciens points de passage sur toute la longueur de la frontière avec la Slovaquie « , ont indiqué les forces de l’ordre. » Nous devons prendre cette mesure préventive afin de faire face à la situation sur le long terme et de décourager les migrants clandestins d’emprunter cette route « , s’était justifié le Premier ministre tchèque conservateur, Petr Fiala. Une première depuis l’entrée des deux pays dans l’espace Schengen, en 2007.
Immédiatement après cette annonce, le ministre hongrois de l’Intérieur, Sandor Pinter, avait indiqué que la Hongrie prévoyait de déployer 4 000 soldats frontaliers à ses frontières Sud.
Le 7 avril, le Conseil de l’Europe avait pourtant fustigé le refoulement » généralisé « des migrants aux frontières. Une pratique émaillée de » violence[s] grave[s] et systématique[s] « , selon l’organisation qui demande aux États membres de mettre fin à ce qu’elle qualifie de » violations des droits humains « . L’Autriche, la Hongrie et la Bulgarie avaient été pointées du doigt dans un rapport de l’institution.
Source : https://www.infomigrants.net