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Méditerranée : l’Aurora immobilisé 20 jours à Lampedusa

Après plusieurs opérations de sauvetages en Méditerranée, le navire humanitaire de l’ONG Sea-Watch International a reçu l’ordre de débarquer ses 72 naufragés dans le port sicilien de Trapani. Une destination beaucoup trop lointaine pour l’équipage de l’Aurora, qui à cause des conditions à bord, n’a « pas eu le choix » que d’accoster sur l’île de Lampedusa, « quatre fois plus proche ». Une décision qui a provoqué son immobilisation par les autorités italiennes.

Bloqué 20 jours à Lampedusa. Voici ce qui attend l’Aurora, après un différend avec les autorités italiennes sur l’attribution d’un port de débarquement.

Retour sur les faits. Vendredi 18 août, après avoir secouru 72 migrants en détresse en Méditerranée centrale, le navire humanitaire de l’ONG Sea-Watch reçoit l’ordre des autorités italiennes de débarquer dans le port sicilien de Trapani. « Inaccessible », répond alors l’équipage, faute de carburant et d’eau en quantité suffisante. Le bateau de petite taille n’est pas non plus équipé pour prendre en charge autant de personnes à bord sur une longue période.

L’Aurora demande donc à se rendre sur l’île italienne de Lampedusa, « quatre fois plus proche ». Cette demande lui est immédiatement refusée.

D’après Sea-Watch, les autorités italiennes ont alors invité l’Aurora à se rendre en Tunisie. « Le débarquement de personnes en Tunisie est contraire au droit international », a réagi l’équipage sur X (ex-Twitter). « Et la Tunisie n’est ni un port sûr ni un pays d’origine sûr ».

Depuis le 10 juillet et la mort d’un Tunisien dans des heurts avec des migrants, les Subsahariens sont visés par une vague de xénophobie dans le ville de Sfax et ailleurs dans le pays. Des centaines d’exilés ont été interpellés et envoyés de force dans le désert, à la frontière avec la Libye ou l’Algérie. Abandonnés au milieu de nulle part, sans eau ni nourriture, au moins 27 migrants n’ont pas survécu.

« Pas d’autre choix » que Lampedusa

Quelques heures après son refus de débarquer en Tunisie, l’Aurora a finalement été autorisé à accoster samedi après-midi à Lampedusa « en raison de la situation extrême à bord » : sur le pont du bateau, « les températures atteignaient 46 degrés » et une personne avait perdu conscience, a détaillé l’ONG.

Depuis, le navire est donc à l’arrêt. Et Sea-Watch « va être condamnée à une amende comprise entre 2 500 et 10 000 euros », a annoncé l’ONG.

Dans un communiqué, Sea-Watch exige la libération immédiate de l’Aurora. « Nous n’avions tout simplement pas d’autre choix que de naviguer vers Lampedusa », s’est justifiée la cheffe de mission, Rebecca Berker, accusant les autorités d’avoir « volontairement mis en danger » la vie des personnes à bord en insistant sur un port alternatif. En agissant ainsi, « l’Italie joue un jeu politique violent, aux dépens des exilés ».

Plus de 105 000 arrivées en Italie

L’attribution du port de Trapani a été rendue possible par un décret du gouvernement italien. Entré en vigueur début 2023, le texte permet aux autorités d’assigner un port spécifique de débarquement aux navires dès le premier sauvetage effectué. Ceux-ci sont également obligés désormais d’effectuer une seule opération de secours à la fois.

L’exécutif assure qu’il s’agit de partager équitablement l’accueil des migrants entre régions italiennes. Les ONG dénoncent, elles, des entraves à l’assistance aux migrants, certains ports choisis étant très éloignés des zones de sauvetage.

>> À (re)lire : Italie : la nouvelle loi sur les sauvetages en mer « nous rend la vie encore plus difficile », estime MSF

Depuis son entrée en fonction en octobre 2022, le gouvernement italien à majorité d’extrême droite dirigé par Giorgia Meloni a multiplié les entraves aux opérations des navires humanitaires et engagé un bras de fer avec ses partenaires européens pour obtenir d’eux davantage de solidarité dans l’accueil des migrants. Son but ? Faire baisser le nombre d’arrivées de migrants.

Mais la méthode semble très peu efficace. Depuis le début de l’été notamment, les sauvetages en mer Méditerranée opérés par les garde-côtes italiens ou les navires humanitaires sont nombreux : les 17 et 18 août, les ONG Open Arms et Médecins sans frontières ont secouru plus de 200 personnes en détresse. Le week-end du 13 août, l’Ocean Viking a même réalisé la plus grosse opération de sauvetage de son histoire en portant secours à plus de 600 personnes en 15 opérations.

>> À (re)lire : Méditerranée : les navires humanitaires ne constituent pas un « facteur d’attraction » pour les migrants, selon une étude

Depuis le début de l’année 2023, plus de 105 000 migrants ont débarqué sur les côtes italiennes, selon le ministère de l’Intérieur, contre moins de 51 000 à la même période l’an dernier. Sur cette route meurtrière, les naufrages sont réguliers. Plus de 2 100 personnes sont décédées en mer en 2023, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

Sources : https://www.infomigrants.net/

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