Un groupe d’enfants non accompagnés qui vivait dans des camps de migrants surpeuplés en Grèce a été transféré la semaine vers le Portugal. Plusieurs milliers d’entre eux se trouvent toujours sur place et sont soumis à d’importants risques en matière de santé mentale.
Un groupe de 25 enfants a pris l’avion à Athènes, le 7 juillet, pour rejoindre le Portugal. Ils font partie d’un total de 1 600 mineurs non accompagnés et vulnérables qui sont censés quitter les camps de migrants sur les îles grecques pour être répartis dans une dizaine de pays au cours des prochains mois. Le Portugal a accepté d’en accueillir 500.
Si ce plan de relogement a été salué par des organisations de défense des droits des enfants, il ne résout le problème général puisque selon des estimations diffusées début avril par l’UNICEF, 5 200 enfants non accompagnés et séparés en Grèce « ont un besoin urgent de solutions durables ».
La plupart de ces enfants sont bloqués dans des camps dangereusement surpeuplés et insalubres, dont le grand camp de Moria sur l’île de Lesbos.
Ils sont exposés à une série de risques en matière de santé mentale auxquels s’ajoute le poids d’un climat de tensions dues aux peurs et à la violence. En effet, la semaine dernière, une dispute autour d’un téléphone portable volé a conduit à la mort d’un jeune Ivoirien de 19 ans.
Katerina Srahulkova est psychologue pour enfants et travaille pour Médecins sans frontières (MSF) sur l’île de Lesbos. Elle estime que le niveau de tension dans les camps a augmenté ces derniers mois à cause des mesures de confinement liées à la pandémie de Covid-19. Ces mesures ont été prolongées à plusieurs reprises.
Seulement deux psychologues travaillent à clinique pédiatrique dans le camp de Moria. Katerina Srahulkova dit être dans l’impossibilité de suivre le rythme des listes d’attente toujours plus longues de personnes cherchant à se faire aider pour des problèmes de santé mentale. Le plus jeune de ses patients a environ un an. Ses parents sont venus lui demander conseil car cet enfant continue à mouiller son lit la nuit et a du mal à s’endormir.
« Très souvent, on nous rapporte des cauchemars très durs qui font que les enfants n’arrivent pas à s’endormir ou se réveillent très souvent la nuit », explique Katerina Srahulkova.
« Ces derniers temps, j’ai aussi de plus en plus d’enfants ou de parents qui parlent de crise de panique. Et parmi les jeunes, il s’agit souvent d’automutilation ou de pensées suicidaires, voire de tentatives de suicide. »
Des parents notent aussi un niveau d’agressivité plus élevé, assure la psychologue. « C’était déjà très difficile pour les occupants du camp avant le confinement. Mais je ressens vraiment un changement en ce moment. Les problèmes de santé mentale sont plus graves. »
« Les gens sont plus irritables et je pense que cela contribue à un niveau de violence plus élevé, ce qui explique que les enfants sont plus vulnérables, souffrent davantage et sont encore plus stressés par les conditions de vie. »
Pour un grand nombre d’enfants, les effets post-traumatiques vont les accompagner à long terme, selon Katerina Srahulkova. « C’est évident que les circonstances et le lieu où vivent les enfants détruisent beaucoup de choses en eux. Peut-être, plus tard, nous serons en mesure de les reconstruire. »
« Pour mes enfants, pour les enfants du camp, mon premier souhait est qu’ils puissent vivre dans un endroit sûr, où ils n’ont pas à craindre que quelque chose leur arrive. Ensuite, je souhaite qu’ils aient un accès à l’éducation et à quelques activités. Parce que si nous nous occupons d’eux, alors ces personnes – si je parle d’un point de vue très pratique – seront utiles à la société plus tard. Les gens éduqués, qui présentent une stabilité mentale peuvent faire quelque chose pour la société qui les accepte. Je souhaite aux enfants un futur. Et de l’espoir. Parce que beaucoup de personnes sont en train de perdre l’espoir et pensent qu’elles seront bloquées dans le camp pour toujours. »
Sources : https://www.infomigrants.net/