Depuis le début de l’année, la petite île italienne de Lampedusa a vu arriver trois fois plus de migrants que l’an dernier à la même période. Parmi eux, on compte de nombreux Tunisiens dont l’exode s’est accentué avec la crise économique, sociale et politique que traverse le pays depuis la fin du confinement imposé pour lutter contre le coronavirus.
Les arrivées de migrants continuent d’augmenter à Lampedusa. En seulement deux jours, plus de 500 personnes ont débarqué sur la petite île italienne de manière autonome ou après avoir été secourues par les garde-côtes. Selon les médias italiens, on dénombre 240 arrivées mercredi 23 juillet et 294 le lendemain.
L’unique centre de Lampedusa est au bord de l’implosion avec 760 migrants hébergés pour une capacité totale de 95 places. Cette saturation s’explique par une hausse des arrivées ces dernières semaines mais également observée depuis le début de l’année.
Trois fois plus d’arrivées cette année à Lampedusa
Entre le 1er janvier et le 22 juillet, 10 463 personnes ont débarqué sur l’île, contre 3 428 l’an dernier à la même période – la majorité étant partie des côtes tunisiennes situées seulement à une centaine de kilomètres de Lampedusa. « Environ 20% sont des ressortissants tunisiens, soit un peu plus de 3 000 », affirme à InfoMigrants Romdhane Ben Amor du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES).
Selon les chiffres de l’association, les interceptions d’embarcations de migrants au large de la Tunisie connaissent également un essor. Au premier semestre de cette année, 269 canots ont été interceptés en Méditerranée par les garde-côtes tunisiens, contre 67 à la même période de 2019 – soit 3 977 personnes arrêtées en mer et renvoyées en Tunisie en 2020 contre 961 pour les six premiers mois de l’an passé.
Les Tunisiens, toujours plus nombreux
« Depuis janvier, on constate que 53% des départs de Tunisie concernent des Tunisiens, les 47% restants sont des Subsahariens », signale Romdhane Ben Amor. « Avec le déconfinement, les Tunisiens reprennent en masse le chemin des côtes pour tenter la traversée vers l’Italie alors qu’en mars, avril et mai, les Subsahariens étaient plus nombreux à prendre la mer car ils se trouvaient déjà le long des côtes », continue le militant.
>> À (re)lire : En Tunisie, « tous les jeunes ont déjà essayé d’aller en Europe, c’est presque un passage obligé »
L’exode des Tunisiens existe depuis de nombreuses années mais les humanitaires ont observé un changement de population à bord des embarcations de fortune. Désormais, des familles entières montent dans des canots à la recherche d’une vie meilleure en Europe. « On voit de plus en plus de grands-parents, d’enfants en bas âge ou même des animaux de compagnie dans les bateaux. Avant, c’était surtout les jeunes qui quittaient le pays », rapporte Romdhane Ben Amor.
Crise économique, sociale et politique
En cause, la crise économique, politique et sociale qui touche le pays et qui s’est accentuée avec la crise sanitaire. « Les gens n’ont pas de travail et plus d’espoir. De plus, ils souffrent aussi du manque d’accès à la santé et à l’éducation. Les plus précaires n’arrivent pas à se faire soigner en Tunisie », déplore ce membre de FDTES qui remarque également une fuite des « cerveaux ». « Les plus pauvres prennent la mer de manière illégale, et les diplômés partent exercer en Europe avec des visas de travail ».
>> À (re)lire : En Italie, les espoirs brisés des migrants tunisiens
Le Forum tunisien regrette que la seule réponse apportée par les autorités se fasse sur le terrain sécuritaire et non sur celui du développement. « Rien n’est fait pour leur apporter de solutions à part la lutte contre l’immigration illégale », souffle Romdhane Ben Amor.
Sources : https://www.infomigrants.net/