Les bateaux Geo Barents et Humanity 1 ont été autorisés à accoster dans le port de Catane, en Italie, dimanche. Mais seule une partie de leurs naufragés, notamment des mineurs et des personnes malades, a pu débarquer. Le Humanity 1 a reçu l’ordre de repartir en mer avec 35 migrants toujours à bord. Mais le capitaine refusait, lundi, de quitter le port. Deux autres navires, l’Ocean Viking et le Rise Above, sont, quant à eux, toujours bloqués en mer, avec des centaines de migrants.
Le blocage des navires humanitaires en Méditerranée se poursuivait, lundi 7 novembre. Dimanche, le navire de Médecins sans frontières (MSF), le Geo Barents, battant pavillon norvégien, a été autorisé par l’Italie à accoster dans le port de Catane, en Sicile, mais une partie seulement des rescapés a pu être débarquée. Tard dans la soirée, 357 migrants ont été autorisés à fouler le sol italien, mais 215 autres sont restés bloqués à bord.
Des familles ont été parmi les premières à quitter le bateau. « Merci, le Geo Barents, merci », a lancé un homme avec un bébé au bras, en débarquant sur la terre ferme après deux semaines en mer. Un autre homme, en fauteuil roulant, a été évacué par des travailleurs de la Croix Rouge.
« Ceux qui restent dans le navire recevront l’assistance nécessaire pour quitter les eaux territoriales » italiennes, ont affirmé, dimanche, des sources proches du ministre des Transports et dirigeant populiste de la Ligue anti-migrants Matteo Salvini, dont dépendent les ports.
Plus tôt dimanche, l’Italie avait déjà effectué un tri dans les rescapés présents, cette fois-ci, à bord du navire Humanity 1. Le nouveau gouvernement d’extrême droite italien a autorisé le débarquement de mineurs et d’autres migrants souffrant de problèmes médicaux.
Trois jeunes filles et un bébé ont été les premiers à débarquer à l’aube du bateau Humanity 1, suivis des garçons mineurs et des hommes adultes ayant des problèmes médicaux, a déclaré à l’AFP Petra Krischok, attachée de presse de SOS Humanity. Au total, 144 personnes ont pu quitter le Humanity 1 au port de Catane mais 35 sont restés à bord.
« C’est une forme de refoulement collectif, ce qui est illégal »
Les autorités ont ensuite exigé que le navire qui bat pavillon allemand quitte le port de Catane. « Le capitaine a refusé cet ordre », a tweeté l’ONG. « La loi maritime l’oblige à mener toutes les personnes secourues en mer dans un port sûr (…). Les survivants ont droit à une évaluation de protection individuelle, qui ne peut avoir lieu que sur terre. Refuser [de prendre en charge] les 35 personnes à bord du Humanity 1 qui recherchent une protection depuis les eaux territoriales est une forme de refoulement collectif, ce qui est illégal. »
Ces migrants « sont extrêmement déprimés », a ajouté Petra Krischok, attachée de presse de SOS Humanity, auprès de l’AFP. « Pour l’instant, nous restons ici et nous attendons. »
Le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi avait déclaré, samedi, que le gouvernement ne ferait pas marche arrière quant à ses obligations humanitaires mais que ceux qui ne sont pas « qualifiés » devraient être pris en charge par l’État du pavillon du navire.
En réaction à ce tri de migrants, le patron du Parti démocrate (PD, principale formation de gauche) Enrico Letta a accusé le gouvernement sur Twitter de violer les traités internationaux. Le PD a affirmé que Matteo Piantedosi devrait s’expliquer devant le parlement.
Le député de l’opposition Aboubakar Soumahoro, qui était présent lors du débarquement de l’Humanity 1, a critiqué, pour sa part, la « sélection des migrants naufragés », qui, selon lui, viole le droit international. Le gouvernement traite « les naufragés, déjà épuisés par le froid, la fatigue, les traumatismes et la torture comme des objets », a-t-il estimé.
« Si les naufragés restants sont rejetés, nous contesterons cette décision devant toutes les instances appropriées », a-t-il déclaré sur Twitter.
« La plus longue période jamais passée par des rescapés sur l’Ocean Viking »
Deux autres navires ont demandé, en vain, de pouvoir accoster : le Rise Above, de l’ONG Mission Lifetime, sous pavillon allemand, et l’Ocean Viking de SOS Méditerranée, enregistré, lui, en Norvège.
Quatre personnes souffrant de « graves complications médicales » ont pu être évacuées du Rise Above, a tweeté l’ONG Mission Lifetime dimanche. Mais à bord, « la situation continue d’empirer ». « Nous exigeons un port sûr maintenant ! », a lancé l’organisation. Quatre-ving-neuf rescapés sont toujours à bord du Rise Above.
Statu quo du côté de l’Ocean Viking, qui transporte 234 naufragés, dont certains depuis plus de deux semaines. Un record pour ce navire humanitaire. « Les conditions météo extrêmes ont été très difficiles pour les personnes qui ont dormi sur le pont, a commenté SOS Méditerranée. Seize jours d’attente : la plus longue période jamais passée par des rescapés à bord de l’Ocean Viking. Leur santé physique et mentale empire. Ils nécessitent un lieu sûr de toute urgence. »
Le bateau naviguait lundi au sud du détroit de Messine.
Le nouveau gouvernement d’extrême droite italien, qui a prêté serment le mois dernier, s’est engagé à durcir sa politique vis à vis des migrants arrivant par bateaux d’Afrique du Nord. Plus de 87 000 personnes ont débarqué en Italie cette année, selon le ministère de l’Intérieur, dont 14 % ont été secourues par des navires humanitaires.
Le ministère norvégien des Affaires étrangères a déclaré, jeudi, qu’il n’assumait « aucune responsabilité » pour les personnes secourues par des navires privés battant pavillon norvégien en Méditerranée. L’Allemagne, de son côté, a insisté, dans une « note » diplomatique adressée à l’Italie, sur le fait que les organisations caritatives « apportaient une contribution importante au sauvetage de vies humaines » et a demandé à Rome « de les aider dès que possible ».
Sources : www.infomigrants.net