Des centaines de rochers ont été déposés, mercredi matin, dans le centre-ville de Calais, autour d’un point de distribution. Les exilés venaient quotidiennement à cet endroit y trouver l’eau potable acheminée par Calais Food Collective, ainsi que de la nourriture le week-end. Certains dormaient sous le pont voisin, désormais bloqué lui aussi par des rochers.
Les images se suivent et se répètent à Calais. Mercredi 1er mars, dans la matinée, Chloé Magnan, une bénévole de Calais Food Collective, découvre avec stupeur des camions en train d’installer des dizaines de rochers au niveau du quai Andrieux, près du pont Mollien. Une voiture de police est présente pour sécuriser l’opération.
C’est ici que l’ONG a installé une cuve d’eau, destinée aux personnes exilées présentes dans le centre-ville. En ce moment, chaque jour, « une trentaine de personnes viennent ici », décrit Chloé Magnan, jointe par Infomigrants.
En plus de l’eau, chaque samedi et dimanche, Calais Food Collective organise sur ce quai des distributions de nourriture. Dans la semaine, d’autres associations assurent une distribution de repas et de tentes non loin de là, sur un parking.
Mais depuis mercredi matin, le passage vers le quai est bloqué. Les rochers s’alignent sur le terre-plein et empêchent tout véhicule d’accéder à la cuve. « Ils ont bloqué le chemin qui y mène. La cuve est toujours là, mais on ne peut pas venir la remplir en eau », déplore Chloé Magnan.
Des rochers également déposés sous le pont
Chaque jour, des bénévoles venaient remplir cette cuve, afin de répondre aux besoins des quelques personnes survivant dans le centre-ville. Celles-ci sont moins nombreuses qu’en périphérie. Ici, « les expulsions sont quotidiennes, parfois très violentes. Généralement, c’est le temps d’une nuit ou deux. Les gens ne restent pas », décrit la bénévole.
Les personnes migrantes dorment sous des ponts, comme celui de Mollien, « pour s’abriter de la pluie et du vent ». Mais là aussi, les autorités ont installé des rochers, empêchant l’accès à cet emplacement pour les nuits à venir.
Contactée au sujet de ces installations de rochers, la mairie de Calais n’a, pour l’heure, pas répondu à nos questions.
Cette installation intervient dans un contexte hivernal difficile pour les migrants à Calais. « Hier, il neigeait », expose Chloé Magnan. « Les associations ont demandé à la mairie de mettre en place un plan grand froid », mais sans succès. Seul un bus supplémentaire a été dépêché pour emmener les volontaires dans un CAES (centre d’accueil et d’examen de la situation), indique la bénévole.
Une série d’opérations similaires
Cette installation est loin d’être la première du genre. En septembre, des centaines de tonnes de rochers avaient été déposées sur les quais du Danube et de la Meuse, deux voies situées non loin de la gare. La maire Natacha Bouchart avait défendu ces installations dans La Voix du Nord, chiffrant le budget de cette pose de rochers à 45 000 euros. « Si on ne veut pas de campements gênants en centre-ville, je me dois d’agir », avait-elle soutenu, invoquant des plaintes de riverains, « un sentiment d’insécurité » et « d’insalubrité ».
« L’État dit que les personnes exilées coûtent cher mais c’est complètement hypocrite quand on voit les sommes qui sont dépensées pour les empêcher de s’installer et empêcher les associations de leur venir en aide », avait alors réagi Pauline, coordinatrice de Human Rights Observers (HRO), auprès d’Infomigrants.