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Tunisie : 150 migrants gambiens rapatriés « volontaires » par l’OIM

L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a annoncé mardi avoir organisé le « retour volontaire » depuis la Tunisie de 105 citoyens gambiens vers leur pays d’origine. L’accélération de ces transferts depuis le début de l’année s’explique par l’importante dégradation des conditions de vie des exilés en Tunisie.

Un vol charter affrété par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en Tunisie a permis le « retour volontaire » de 105 ressortissants gambiens vers leur pays d’origine mardi 30 septembre. Il s’agit du 18e vol depuis le début de l’année organisé au départ de la Tunisie par l’agence onusienne.

« Après une tentative de traversée qui a failli me coûter la vie, j’ai décidé de rentrer chez moi », explique Moussa, l’un de ces migrants gambiens rapatriés. Ce père, dont les enfants étaient restés en Gambie, a vécu en Tunisie pendant deux ans. « À Sfax [dans le centre-est de la Tunisie, ndlr], des amis m’ont parlé de l’OIM, et je me suis inscrit pour le retour ».

La semaine dernière, 148 ressortissants guinéens avaient déjà pu regagner leur pays à bord d’un précédent vol charter. Et au mois d’août, ce sont 268 migrants originaires de Guinée qui ont été rapatriés dans leur pays d’origine.

Ces vols de retour sont organisés dans le cadre du programme d’aide au « retour volontaire » et à la réinsertion organisé par l’OIM. Au delà du rapatriement, le programme prévoit un accompagnement des migrants à leur retour pour faciliter leur réintégration socio-économique dans des conditions dignes et durables, a indiqué l’agence onusienne.

« Je souhaite reprendre mon ancien travail de chauffeur de camion, mais pour l’instant, je suis surtout heureux de revoir mes enfants et mes proches » rapporte Moussa.

La Tunisie reste l’un des principaux points de transit pour les migrants, notamment Subsahariens, désireux de rejoindre l’Europe.

Dégradation des conditions de vie des migrants en Tunisie

Du 1er janvier au 30 juillet, 5 336 migrants ont pu bénéficier d’un « retour volontaire » depuis la Tunisie via 12 vols charters et 201 vols commerciaux vers 25 pays, a indiqué l’OIM dans un communiqué daté du 31 juillet. L’agence saluait des « avancées significatives de son programme d’aide au ‘retour volontaire’ et à la réintégration (AVRR) durant la première partie de l’année ». Pour le seul mois de juillet, plus de 1 000 personnes avaient pu quitter la Tunisie par ce biais.

En comparaison, 7 250 migrants originaires d’Afrique subsaharienne avaient bénéficié de ce dispositif au cours de l’année 2024contre seulement 2 250 en 2023.

Cette accélération des demandes de « retour volontaire » depuis le début de l’année traduit surtout une aggravation des conditions de vie des migrants en Tunisie. Les Subsahariens présents dans ce pays du Maghreb sont confrontés à une précarité extrême, des violences quotidiennes notamment le démantèlement de camps, des arrestations arbitraires ainsi que des expulsions dans le désert.

« Je n’en peux plus, je veux quitter la Tunisie », rapportait en juillet à InfoMigrants Seydou*, un Ivoirien de 24 ans. « La vie en Tunisie est devenue trop difficile. Tout va mal », expliquait aussi Abdoulaye*, un autre Ivoirien de 19 ans établi près de Sfax. « On ne peut plus travailler car les employeurs refusent les Noirs, on ne peut plus se loger pour les mêmes raisons. Et les policiers viennent tout le temps détruire nos cabanes en nous disant de rentrer chez nous. On n’ose pas sortir car on a peur d’être agressé dans la rue par des Tunisiens qui nous volent nos téléphones et notre argent », confiait à InfoMigrants le jeune homme.

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Face à cette situation infernale, ils sont des milliers de migrants en Tunisie à solliciter l’aide au « retour volontaire » de l’OIM et espérer pouvoir rentrer chez eux prochainement. Sur la période de janvier à août 2025, l’OIM a enregistré une hausse de 20% des demandes d’aide au retour.

En parallèle, le président Tunisien, Kaïs Saïed continue de mettre la pression sur les instances internationales pour augmenter les rapatriements. Fin mars, il avait appelé l’OIM à intensifier ses efforts pour assurer les « retours volontaires » des personnes subsahariennes en situation irrégulière vers leurs pays d’origine.

Saturation du programme d’aide au « retour volontaire »

Si le dispositif de l’OIM tourne à plein régime ces derniers mois, l’agence tunisienne se retrouve dépassée par l’afflux des demandes. Débordée, l’OIM peine à prendre en charge tous les dossiers et les retards s’accumulent.

« Le délai de traitement d’un dossier peut varier en fonction de plusieurs paramètres, tels que la situation personnelle du migrant, les procédures médicales et légales, notamment dans les cas de mineurs non accompagnés, les contraintes logistiques ou les formalités administratives liées au pays de retour », soulignait en juillet l’OIM à InfoMigrants. « Le départ intervient généralement dans un délai de quelques semaines, sous réserve de la finalisation des aspects logistiques », ajoutait l’agence. Car l’OIM a besoin d’un laissez-passer consulaire pour procéder au rapatriement, or les ambassades peuvent mettre beaucoup de temps à délivrer ce précieux sésame.

Dans le même temps, les quatre centres de l’agence dans le pays – qui accueillent environ 500 personnes – sont saturés et ne peuvent pas répondre à tous les besoins exprimés. Des centaines de personnes se retrouvent alors livrées à elles-mêmes.

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Plusieurs témoignages d’exilés recueillis par InfoMigrants font état de leur désespoir face à la situation. « On se soutient entre nous, on cotise pour acheter de la nourriture mais certains jours, je n’ai rien à manger. On n’a même pas d’eau. On en récupère un peu au système d’arrosage des propriétaires des champs », racontait encore Seydou. « Tout ce que je veux, c’est rentrer chez moi. Si j’avais de l’argent, je paierais pour ‘me retourner’ ».

Depuis 2023 et un accord signé avec l’Union européenne, le gouvernement tunisien fait tout pour éloigner les exilés des côtes du pays – notamment en les expulsant dans le désert à la frontière avec l’Algérie ou la Libye – et les empêcher de prendre la mer vers l’Europe. Les traversées vers l’Italie sont ainsi quasi à l’arrêt. Au premier semestre 2025, quelque 2 000 migrants ont atteint les côtes italiennes depuis les plages tunisiennes, contre plus de 10 000 à la même période l’an dernier, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur italien.

Sources: infomigrants

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