Parler de la question migratoire et de celle des réfugiés, c’est confronter la société à l’accueil puis à l’installation, aux droits à la santé et à l’éducation, et bien sûr à l’intégration professionnelle. Beaucoup de chercheurs soulignent que les nombres ne sont pas si importants lorsqu’on les place en perspective avec ceux des pays européens, et surtout avec un recul historique. Pourtant, la thématique inspire la méfiance, et les entreprises, sous le spectre de leur volet d’engagement sociétal en développement, ont très rapidement dû s’emparer de la problématique. Accueil, insertion, emploi : en tant que puissances économiques et membres de la société, elles ne pouvaient pas rester indifférentes ni immobiles.
Bien sûr, comme les particuliers, plusieurs d’entre elles ont immédiatement fait des dons financiers et des dons dits en nature (des denrées, des habits, des produits d’hygiène). Remontant la chaîne du mécénat, elles se sont mises à appliquer le mécénat de compétences pour aider les associations. Elles s’engagent souvent sur leur coeur de métiers comme le fait la Fondation Sanofi pour la santé (partenaire de ce dossier). Sollicitées par le grand public et par le tiers secteur, elles se sont mobilisées. Associations et ONG réfléchissent ensemble, parfois en partenariat avec les entreprises mécènes, pour mettre en oeuvre des solutions durables. L’intégration et le mieux-vivre des réfugiés sont l’objet de créations d’entreprises de l’économie sociale et solidaire (le traiteur Les Cuistots migrateurs par exemple) ou le volet de certaines d’entre elles, comme le programme Refugeeks de Simplon.co. Des évènements sont maintenant dédiés à la question : colloque de la Fondation EDF l’été dernier ; Techfugees qui a eu lieu fin octobre 2017 ; un colloque qui rassemblera 260 associations (dont de très grosses ONG comme Amnesty International, Attac, Cimade, Emmaüs, Médecins du monde, Secours catholique) en fin d’année ou encore des sessions dédiées dans des conférences professionnelles (Convergences, Forum des associations).
« Il existe 280 millions de personnes ayant un statut de réfugié, sans drapeau, sans hymne national. Leur nombre a augmenté de 40 % ces 10 dernières années. C’est la cinquième plus grande nation au monde. D’un point de vue business, vous voulez implanter votre entreprise dans cette nation, non? » Hikmet Ersek, CEO de Western Union, 46e Forum de Davos, janvier 2016.
S’il y a bien les dérives que l’on imagine et le problème de l’emploi non déclaré, notamment parce que les personnes sans papiers n’ont pas le droit de travailler légalement sur le sol français, l’emploi des réfugiés est une problématique importante. Le problème est complexe et les chiffres sont rares, ou peu exploitables. Les profils sont uniques, tout comme les parcours. Parmi les différences marquantes, on peut noter que la part des personnes en études est plus importante pour les nouveaux migrants réfugiés que pour les non-réfugiés, ou encore que les femmes migrantes sont de manière générale plus souvent diplômées et mieux diplômées que les hommes selon l’enquête ELIPA 2009-2013. L’emploi offrant l’intégration, cette question est prise en charge par de nombreux groupes. La plateforme Action Emploi Réfugiés compte 200 membres qui postent des offres d’emplois quotidiennement. Les annonces sont d’une grande variété, comme les niveaux de qualification. La plateforme propose également un accompagnement individuel. Les entreprises embauchent, parfois à grande échelle comme Starbucks qui cet été annonçait employer 2 500 personnes réfugiées en Europe dans le cadre d’un plan de recrutement de 10 000 réfugiés sur cinq ans dans 75 pays. Qu’elles le disent ou qu’elles le taisent, les entreprises françaises emploient de plus en plus de personnes réfugiées, en les accompagnant avec des programmes de formation et de coaching, comme Carrefour ou Total dont les fondations sont partenaires du Carenews Journal n°9. Adecco mène un projet pilote en partenariat avec l’État pour assurer l’intégration de réfugiés : ils sont pris en charge, de l’évaluation des compétences à la recherche d’emploi.
On ne sait pas encore si une stabilité émergera de cette multitude d’actions. On ne peut que constater que les problèmes sont nombreux, et des vies humaines abîmées, avec l’espoir – sinon nous ne ferions pas ces métiers-là – que les volontés et les moyens de tous les acteurs (particuliers, associatifs, publics, privés) parviennent à recréer un vivre ensemble digne de ce nom.
Sources : carenews.com