Après les séismes qui ont frappé la Turquie et la Syrie, le 6 février dernier, les réfugiés syriens installés en Turquie se posent la question de leur avenir. Beaucoup ont perdu tout ce qu’ils avaient construit au cours des dix dernières années. Face à cette situation, certains ont choisi de rentrer en Syrie. C’est le cas de Mohamed et sa famille. En dépit des bombardements qui frappent encore leur ville d’origine, Idlib, ils espèrent y trouver un peu de réconfort auprès de leurs proches.
« La Syrie est un pays très dangereux. Idlib me fait peur. Les avions me terrifient. Mais, si nous mourrons dans les bombardements, au moins nous serons enterrés en Syrie. Après tout ce qu’on a vécu, c’est peut-être notre dernier espoir.
Nous avons échappé à la mort à Idlib. Et aujourd’hui, [dans les séismes], nous avons échappé une nouvelle fois à la mort.
Nous avons réussi à sortir de chez nous dès le premier séisme [le 6 février 2023, à 4 heures environ]. Au moment du deuxième tremblement, nous avons vu des bâtiments tomber, puis notre immeuble s’est effondré. Nous nous sommes enfuis avec les seuls vêtements que nous portions.
Les séismes qui ont frappé la Turquie et la Syrie ont fait plus de 45 000 morts dans les deux pays. Selon les autorités turques, plus de 118 000 bâtiments ont été détruits ou gravement endommagés.
[Depuis le séisme], les autorités ont installé des camps dans les villes, notamment pour accueillir des Turcs. Nous avons essayé d’avoir une tente, mais personne n’a répondu à notre demande. Nous voulons juste un endroit pour nous abriter de la pluie, de la neige et du froid. Dans ce froid et sans tente, nous avons décidé de rentrer en Syrie.
Depuis le 15 février, les Syriens bénéficiant de la protection temporaire en Turquie et vivant dans l’une des dix régions touchées par les séismes du 6 février sont autorisés à se rendre en Syrie pour une période pouvant aller jusqu’à six mois.
Je n’oublierai jamais le bombardement de notre maison
À Idlib, notre maison a été bombardée le 29 septembre 2016. C’est une date qu’on n’oubliera jamais. J’étais avec ma famille : ma mère et mes quatre frères et sœurs.
Échappant depuis mars 2015 au contrôle des forces du régime du président Bachar al-Assad, la province rebelle d’Idlib est, en 2016, contrôlée par « l’Armée de la conquête », une coalition composée principalement du Front al-Nosra et d’autres groupes djihadistes et rebelles islamistes. La province subit alors des frappes massives et quasi-quotidiennes du régime syrien et de son allié russe.
Nous vivions dans un quartier civil, loin de tout groupe armé ou extrémiste. Un missile est tombé sur notre maison. Nous nous sommes échappés des décombres.
[Depuis], j’ai une blessure au dos et à la tête. J’ai des éclats d’obus dans la tête et derrière les yeux. Les cicatrices sont visibles. J’ai aussi 37 éclats dans le dos.
Nous sommes de la classe moyenne. C’est-à-dire que si on ne travaille pas, on ne mange pas.
[Pour quitter la Syrie], nous avons dû emprunter de l’argent à nos proches. Et nous sommes entrés illégalement en Turquie.
Depuis, nous n’avons pas cessé de travailler. Avant le séisme, ma mère tricotait des vêtements en laine. Mon père travaillait dans les champs d’oliviers et de vignes. Mon petit frère travaillait dans une boulangerie après l’école. On se débrouillait. On avait pu ouvrir une boutique de vêtements mais elle a été détruite par les séismes.
Aujourd’hui, nous ne nous soucions pas de l’argent mais nous cherchons la sécurité physique et psychologique. Nous voulons juste un peu de repos, pouvoir poser nos têtes sur un oreiller, dormir et nous reposer. »
Sources : www.infomigrants.net