Les corps de 12 migrants ont été découverts, mercredi, près du village turc de Pasakoy, à la frontière grecque. Ils étaient peu vêtus malgré les températures glaciales, certains étaient même torse nu. Onze victimes étaient déjà mortes de froid à l’arrivée des secours. La 12e victime est décédée à l’hôpital. Ankara accuse Athènes d’être responsable du drame.
Les corps de 12 migrants morts de froid ont été découverts, mercredi 2 février, en Turquie, à proximité immédiate de la frontière grecque, a annoncé le ministre turc de l’Intérieur, Süleyman Soylu.
Ce dernier a accusé la Grèce d’être responsable de ce drame. « Douze des 22 migrants repoussés par les douaniers grecs, dépouillés de leurs vêtements et de leurs chaussures, sont morts de froid », a-t-il tweeté en dévoilant des images floutées particulièrement dures. On y devine des corps à peine couverts, vêtus de vêtements légers et sans chaussures, certains semblent avoir le torse nu, alors que les températures sont glaciales dans la région. Les corps sont étendus sur un chemin boueux.
Les victimes ont été découvertes au niveau du village de Pasakoy, à la frontière turco-grecque, a indiqué le gouvernorat d’Edirne (Nord-Est). Onze des 12 victimes étaient déjà mortes quand elles ont été retrouvées, la douzième est décédée dans un hôpital local, a précisé le gouvernorat.
« L’Union européenne est impuissante, faible et inhumaine »
Les deux pays se renvoient depuis toujours la responsabilité de la prise en charge des migrants à cette frontière. « L’Union européenne est impuissante, faible et inhumaine », a déclaré le ministre turc de l’Intérieur, allant jusqu’à traiter Athènes de « voyou ». Ankara accuse régulièrement les autorités grecques de repousser illégalement vers la Turquie les migrants tentant de passer en Grèce, ce qu’Athènes a toujours démenti.
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Athènes accuse en retour Ankara de fermer les yeux sur les personnes qui tentent de passer en Grèce, en violation de l’accord de mars 2016 qui prévoyait un réel effort de la Turquie pour limiter les migrations à partir de son territoire en échange d’une aide financière de six milliards d’euros de la part de l’UE. La Turquie rejette également ces accusations.
Refoulements réguliers
Dans la région de l’Evros, où les 12 corps ont été retrouvés, les refoulements illégaux sont nombreux. Il y a 15 jours, un groupe de migrants s’est retrouvé bloqué sur une minuscule île entre les deux pays. Interdits d’entrer en Grèce et de revenir en Turquie, les 29 exilés se sont retrouvés piégés sans eau, ni nourriture. Au mois d’août 2021, une cinquantaine de personnes avaient déjà été bloquées sur une autre île, à la frontière gréco-turque. Les images envoyées à des associations montraient des membres du groupe sans chaussures.
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InfoMigrants reçoit régulièrement des témoignages de migrants affirmant avoir été refoulés par les garde-côtes grecs. En octobre dernier, la rédaction avait pu rencontrer un ex-policier grec à la retraite qui déclarait avoir lui-même renvoyé illégalement, pendant des années, des milliers de migrants vers les côtes turques. « Régulièrement, mes collègues m’appelaient pour me prévenir qu’ils allaient venir avec des migrants. Ils étaient généralement rassemblés par groupe de 10 environ. Mon rôle était simple : je les faisais monter sur mon bateau, souvent à la tombée de la nuit et je les ramenais vers les côtes turques », avait-il raconté.
Depuis des années, les migrants sont victimes de ce ping-pong entre les deux pays et les morts se comptent par centaines. Beaucoup sont décédés d’hypothermie ou noyés dans le fleuve Evros.
Dans la mer Égée aussi, les refoulements sont importants. Au début du mois de janvier, une ONG norvégienne Aegean Boat Report, a recensé 629 cas de refoulements illégaux de migrants dans les îles de la mer Égée en 2021.
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La Turquie accueille actuellement près de cinq millions de réfugiés sur son territoire, selon le décompte officiel – 4,1 millions selon le Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR), dont une majorité de Syriens.
Près d’un million de personnes, principalement des réfugiés syriens, étaient arrivées dans l’UE en 2015 après un périple depuis la Turquie vers les îles grecques proches. Cette vague massive avait conduit l’Union à conclure un accord avec la Turquie, chargée de garder les frontières en échange d’une contribution européenne de six milliards d’euros.
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Source: https://www.infomigrants.net