Le Geo Barents, le navire humanitaire de Médecins sans frontières (MSF) a porté secours, lundi, à 71 personnes en grande détresse dans les eaux libyennes. À son arrivée sur les lieux du drame, 22 personnes, dont des enfants, avaient déjà disparu.
Tout au long de l’année y compris l’hiver, les navires d’ONG présents en Méditerranée centrale sauvent la vie de milliers de personnes en détresse en mer. Lundi 27 juin, le Geo Barents est arrivé trop tard pour 22 exilés.
Ce jour-là à 17h, le navire humanitaire de Médecins sans frontières (MSF) est alerté par Alarm Phone de la présence d’un bateau en détresse dans la zone de recherche et sauvetage (SAR) libyenne. L’équipage, qui avait repris la mer ce week-end depuis Augusta en Sicile, modifie alors sa trajectoire et se dirige le plus vite possible vers les lieux. « Nous avions très peu d’informations : nous savions juste que nous devions trouver un bateau pneumatique blanc », indique Anna Pantelia, en charge de la communication à bord.
L’embarcation était partie de Libye. À bord, « la majorité des personnes » étaient d’origine camerounaise. Il y avait aussi des ressortissants maliens et ivoiriens.
Au bout de trois heures de navigation, le Geo Barents parvient à localiser l’embarcation. « Quand nous sommes arrivés sur place, nous avons tout de suite compris que c’était très grave. Il y avait beaucoup d’eau à l’intérieur du bateau, et aussi des personnes en mer. Nous n’avons pas eu le temps de leur parler, on leur a immédiatement donné des gilets de sauvetage. »
D’après les 71 rescapés – 52 hommes et 19 femmes – 22 personnes manquaient à l’appel. « À l’intérieur de l’embarcation, deux femmes nous ont dit avoir perdu leurs enfants. Et une jeune fille, dont le petit frère s’était noyé, pleurait beaucoup. »
Un bébé qui ne respirait plus à l’arrivée du Geo Barents a quant à lui été ranimé par l’équipage. Le nourrisson et sa mère ont été évacués quelques heures plus tard en hélicoptère vers Malte.
Pendant le sauvetage, l’équipage de MSF a également vu flotter le corps d’une femme, le visage contre la surface de l’eau. « On l’a pris avec nous et on a essayé de la sauver, assure Anna Pantelia. Mais il était trop tard. »
Le navire attend désormais de se voir attribuer un port sûr pour débarquer les 71 rescapés, dont certains sont « très faibles ». « Au moins 15 % des survivants souffrent de brûlures moyennes à graves et nécessitent un suivi supplémentaire », a fait savoir le chef de l’équipe médicale MSF à bord.
Tous sont « traumatisés et très choqués » par le naufrage.
« De nombreuses heures en plein soleil sans eau ni nourriture »
En Méditerranée centrale, les sauvetages se répètent aussi pour les autres ONG mer. Après trois opérations de sauvetage effectuées entre le 24 et le 27 juin, 156 personnes se trouvent maintenant à bord de l’Ocean Viking de SOS Méditerranée. La dernière opération a permis de secourir 66 personnes qui se trouvaient à bord d’un bateau gonflable dans la zone de recherche et sauvetage (SAR) maltaise. Les personnes avaient passé au moins 48 heures en mer et montraient des signes d’épuisement.
Le Louise Michel, affrété par le street-artiste Banksy, a été autorisé cette nuit à débarquer sur l’île italienne de Lampedusa. Depuis une opération de sauvetage effectuée le 24 juin, 59 personnes patientaient à bord.
Le Sea-Watch 4, qui attendait en mer depuis plus d’une semaine avec 304 rescapés à bord s’est vu lui attribuer dans la soirée du lundi 27 juin un port sûr, à Porto Empedocle, en Sicile. « Nous sommes tellement soulagés que les rescapés puissent enfin débarquer après ce qu’ils ont vécu », a réagi l’ONG sur Twitter. Neuf personnes avaient déjà dû être évacuées du navire ces derniers jours pour urgence médicale.
>> À (re)lire : Méditerranée : plusieurs bateaux en attente d’un port sûr pour débarquer plus de 500 migrants
Le voilier Nadir et l’Aïta Mari, de l’ONG Maydayterraneo, ont quant à eux pu débarquer les rescapés secourus – respectivement 19 et 110 personnes – à Lampedusa et à Augusta, en Sicile. « Lors du dernier sauvetage, il y avait de nombreux enfants entre 14 et 16 ans qui avaient passé de nombreuses heures en plein soleil sans eau ni nourriture. Toutes les personnes secourues racontent des histoires de véritable terreur de leur temps en Libye », indique l’Aïta Mari sur Twitter.
Le navire est désormais en route pour le port espagnol de Borriana, pour que l’équipage puisse se reposer et effectuer quelques travaux. L’équipage « espère pouvoir repartir [en Méditerranée centrale] après l’été ».
La rédaction tient à rappeler que les navires humanitaires (Ocean Viking, Sea Watch, Mare Jonio…) sillonnent une partie très limitée de la mer Méditerranée. La présence de ces ONG est loin d’être une garantie de secours pour les migrants qui veulent tenter la traversée depuis les côtes africaines. Beaucoup d’embarcations passent inaperçues dans l’immensité de la mer. Beaucoup de canots sombrent aussi sans avoir été repérés. La Méditerranée reste aujourd’hui la route maritime la plus meurtrière au monde.