Une vidéo publiée par une ONG montre une file d’hommes à moitié nus sur une route près de la frontière entre la Serbie et la Macédoine du Nord. Ces migrants ont été expulsés manu militari par les forces serbes vers le pays voisin.
La scène a été filmée par un habitant du village de Lojane, ville frontalière de la Macédoine du Nord. Postée le 15 février sur le réseau social X (ex-Twitter) par l’ONG nord-macédonienne Legis, et reprise par le quotidien britannique The Guardian, une vidéo montre une file d’hommes à moitié nus marcher en pleine nuit sur une route près de la frontière avec la Serbie.
L’ONG affirme qu’en 48 heures, 70 migrants ont été refoulés par les autorités serbes et forcés de se déshabiller, ou de rester en sous-vêtements. Et ce alors que les températures s’élevaient à seulement trois degrés dans la région.
« Les gens sont arrivés battus, effrayés et volés durant le week-end du 10 février », signale sur X Legis, qui a réussi à entrer en contact avec des dizaines d’entre eux. L’ONG évoque « un incident d’une ampleur jamais observée ces sept dernières années ».
Ces refoulements sont « désormais une pratique régulière »
Selon le directeur du Centre de protection des demandeurs d’asile en Serbie, Rados Djurovic, cité par The Guardian, ces « pushbacks » tendent à s’accélérer en ce début d’année. « C’est désormais une pratique régulière », signale-t-il.
Les humanitaires « appelle[nt] à l’arrêt immédiat de cette déshumanisation des migrants et des violations de leurs droits humains ». Ils réclament également qu’une enquête soit menée pour faire toute la lumière sur ce refoulement « inquiétant et dégradant ».
Même demande formulée par la commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatovic. Elle évoque par ailleurs, elle aussi, « des rapports récents [sur des] refoulements présumés par des policiers serbes à la frontière avec la Macédoine du Nord, caractérisés par des traitements dégradants et des vols de migrants ».
« Ces incidents sont non seulement inquiétants, mais aussi révélateurs d’une tendance plus large parmi les États membres du Conseil de l’Europe », estime Dunja Mijatovic. « Ces actions semblent violer la Convention européenne des droits de l’Homme, qui interdit le refoulement et les expulsions collectives », continue-t-elle.
D’autres pays connus pour utiliser le déshabillage forcé
D’après le président de l’ONG Legis, c’est la première fois que ce genre de pratiques sont observées à la frontière entre la Serbie et la Macédoine du Nord. Mais dans d’autres pays, ces méthodes ont déjà été répertoriées. La Bulgarie, et plus particulièrement la Grèce, ont plusieurs fois été épinglées pour avoir obligé des exilés à se déshabiller avant d’être renvoyés côté turc.
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Dès 2020, le réseau d’organisations Border violence monitoring network documentait dans un rapport ce genre d’agissements. Cette année-là, 44% des témoignages enregistrés décrivaient des cas de déshabillage forcé. En Croatie aussi, « de nombreux témoignages révèlent que la police met régulièrement le feu aux vêtements des migrants, avant de les repousser à travers les zones frontalières, les forçant à marcher nu pendant plusieurs heures, souvent dans des conditions météorologiques extrêmes ».
Malgré les critiques, Athènes a continué d’utiliser ces méthodes. En décembre 2021, c’est un interprète afghan de l’agence européenne de surveillance des frontières, Frontex, qui a été agressé par les autorités grecques. Les garde-frontières européens l’avaient pris pour un migrant. Après son arrestation, il a été déshabillé de force et contraint de monter dans un canot sur la rivière Evros, direction la Turquie.
Selon un rapport d’une ONG belge, plus de 346 000 refoulements forcés ont eu lieu aux frontières extérieures de l’Europe en 2023.
Sources: https://www.infomigrants.net/
